inventer un viol de la
mere: M. de Saint-Andre a viole madame Darcey et a disparu sans meme
savoir que la malheureuse femme est morte de cet attentat, apres avoir
donne le jour au petit Georges.
Est-ce tout? les faits se trouvaient-ils des lors combines de facon a
pouvoir soutenir la these? Non, il etait necessaire de fausser encore
d'un coup de pouce la realite. M. Darcey avait eleve Georges. Seulement,
il ne fallait pas que Georges connut le mystere de sa naissance. Il
devait l'apprendre a vingt-cinq ans, pour etre frappe par ce coup de
foudre, et en recevoir un tel ebranlement, qu'il se mit immediatement
a la recherche de son pere, dans un but etrange que je dirai tout a
l'heure.
Alors, afin d'obtenir les situations voulues, les auteurs ont imagine le
premier acte suivant. Georges attend M. Darcey, qui revient d'Amerique.
Il l'attend avec d'autant plus d'impatience qu'il doit epouser, des son
retour, une jeune fille qu'il aime, mademoiselle Alice Herbelin. Mais il
n'est pas sans inquietude. On n'a pas de nouvelles du _Saint-Laurent_,
qui ramene M. Darcey. Brusquement, une depeche arrive, annoncant la
perte du _Saint-Laurent_ sur les cotes de Bretagne. Georges sanglote, et
son desespoir est tel qu'il veut se tuer. C'est a ce moment que Borel,
un vieil employe de la maison, pour empecher ce suicide, raconte au
jeune homme que M. Darcey n'est pas son pere. Naturellement, tout de
suite apres cet aveu, M. Darcey se presente. Il a ete sauve. Georges
se jette d'abord dans ses bras, puis il se montre trouble, et une
explication a lieu. A la fin de l'acte, le jeune homme, ajournant son
mariage, part a la recherche de son pere, pour venger sa mere.
On voit quels evenements peu naturels les auteurs ont du employer
pour arriver a justifier leur donnee premiere. Je passe encore sur la
singuliere depeche qui determine le desespoir de Georges; il y a la une
histoire de capitaine remplace pendant la traversee qui est enfantine.
Ce qui est plus grave, c'est la situation fausse de ce jeune homme, dont
la premiere idee est de se faire sauter la cervelle, parce que son pere
est mort. Je doute que les auteurs aient a citer un fait reel pour
appuyer leur fable. Je ne dis point que la perte d'un etre cher ne
puisse pas tuer, apres des journees de larmes. Mais, la, brusquement,
prendre un pistolet, c'est bien peu vraisemblable. Evidemment, les
auteurs n'ont pas eu d'autre but que d'amener la confidence de Borel, a
l'aide de ce suicide
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