ile plus complaisant qu'une forme
pittoresque; on cache la-dessous toutes les erreurs imaginables.
Ce qu'il faut demander avant tout a une oeuvre, que le romancier ait
cru devoir prendre la plume d'Henri Monnier ou celle de Bossuet, c'est
d'etre une etude exacte, une analyse sincere et profonde. Quand les
personnages sont plantes carrement sur leurs pieds et vivent d'une vie
intense, ils parlent d'eux-memes la langue qu'ils doivent parler.
II
La premiere representation au Gymnase de _Chateaufort_, une comedie en
trois actes de madame de Mirabeau, m'a paru pleine d'enseignements.
Pendant que le public tournait au comique les situations dramatiques,
et que les critiques se fachaient en criant a l'immoralite, je songeais
qu'il y avait la un malentendu bien grand, j'aurais voulu pouvoir
transformer d'un coup de baguette cette piece mal faite en une piece
bien faite, et changer ainsi en applaudissements les rires et les
indignations; car, au fond, il s'agissait uniquement d'une question de
facture.
Voici, en gros, le sujet de la piece. Le marquis de Ponteville a donne
sa fille Nadine en mariage a M. de Chateaufort, un homme de la plus
grande intelligence, que le gouvernement vient meme de charger d'une
mission diplomatique. Puis, le marquis s'est remarie avec une demoiselle
d'une reputation equivoque. Mais voila que Nadine acquiert la preuve,
par une lettre, que son mari a ete l'amant de sa belle-mere. Le beau
Chateaufort, l'homme irresistible et magnifique, est un simple gredin.
Precisement, il vient de commettre une premiere sceleratesse. Aide de la
marquise, il a decide le marquis a lui leguer le chateau de Ponteville,
au detriment de Pierre, le frere aine de Nadine. Celui-ci apprend tout
par le notaire qui a redige le testament. Un singulier notaire qui, pour
se venger d'avoir recu des honoraires trop faibles, denonce tout le
monde, et apprend surtout a la marquise que Nadine a des rendez-vous
avec M. de Varennes, rendez vous fort innocents d'ailleurs. Des lors, la
guerre est declaree entre les deux femmes. Madame de Ponteville accuse
madame de Chateaufort d'adultere, et fait prendre par le marquis une
lettre que celle-ci semble vouloir dissimuler. Mais justement cette
lettre est celle qui revele la liaison de Chateaufort et de madame
de Ponteville. Le marquis a un coup de sang, dont il se tire pour se
lamenter. Enfin Chateaufort, auquel le gouvernement vient de retirer
sa mission, comprend qu'il gene tout le
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