mme qui pleurait son mari, et de ces enfants qui
attendaient leur pere!
A mon inquietude d'ailleurs se melait une esperance bien faible, il est
vrai, mais enfin qui etait d'une realisation possible. Pourquoi M. de
Planfoy n'aurait-il pas ete relache? Pendant que je le cherchais, il
etait peut-etre chez lui; il avait pu se sauver; il avait pu aussi faire
reconnaitre son innocence; tout ce qu'on se dit quand on veut esperer.
Mais aucune de ces heureuses hypotheses n'etait vraie. Madame de Planfoy
et ses enfants etaient dans les larmes, attendant toujours.
Lorsqu'on me vit arriver seul, l'emotion redoubla: les affiches, portant
l'epouvantable proclamation de Saint-Arnaud, avaient ete apposees dans
le faubourg, et l'on ne parlait que de fusillade.
--La verite, s'ecria madame de Planfoy lorsque j'entrai, la verite: je
meurs d'angoisse!
--J'ai l'ordre de le faire mettre en liberte.
--Ou est-il, l'avez-vous vu?
Je fus oblige de dire la verite.
--On ne sait pas ou il est, dit-elle avec un sanglot, en retombant de
l'esperance dans l'inquietude; mais qui vous assure qu'il est encore en
vie?
Je lui dis tout ce que je pus trouver pour la rassurer; mais quelle
puissance peuvent avoir nos paroles lorsque c'est l'esprit qui les
arrange et non la foi qui les inspire?
--Vous avez cet ordre? dit-elle, lorsque je fus arrive au bout de mon
recit.
--C'est un ordre de liberation qui n'admet pas le refus ou la
resistance.
Puis, comme je voulais changer l'entretien:
--Voulez-vous me le montrer? dit-elle.
Il etait impossible de refuser, sous peine de laisser croire que je
n'avais pas cet ordre. Je le donnai.
--Vous voyez bien, s'ecria-t-elle desesperement: "s'il est encore en
vie;" eux-memes admettent qu'il a du etre fusille. Ah! mes pauvres
enfants!
A ce cri, les enfants se jeterent au cou de leur mere, et ce fut une
scene dechirante; je savais ce qu'etait la perte d'un pere; leur douleur
raviva la mienne.
Mais nous n'etions pas dans des conditions a nous abandonner librement a
nos emotions. Je me raidis contre ma faiblesse et j'expliquai a madame
de Planfoy que j'allais immediatement au fort d'Ivry ou j'avais des
chances de trouver M. de Planfoy.
--Je vais avec vous, dit-elle.
Il me fallut lutter pour lui faire comprendre que cela n'etait pas
possible.
--Il n'y a aucune utilite, lui dis-je, a venir avec moi; soyez bien
convaincue que je ferai tout ce qui sera possible.
--Je le sais, mais je n
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