ient qu'a l'heureux
rival qu'elle leur preferait. Elle monta a cheval dans la cour apres
avoir pris la clef du rez-de-chaussee, qu'elle avait demandee a ma femme
sous pretexte de prendre un instant de repos dans le salon, pendant
qu'on briderait son cheval pour repartir; elle remit cette clef dans sa
poche, non sans avoir bien barricade son amant pour qu'il ne fut derange
dans sa retraite par aucun curieux, et le domestique qui l'accompagnait,
et qui etait ou n'etait pas dans le secret, emporta egalement la clef
de la cour. Fernande partit au milieu d'une haie de spectateurs qui
feignaient de fumer leur pipe en parlant de leurs affaires, mais qui se
porterent aussitot apres en embuscade a la fenetre du grenier par ou
l'amant etait entre d'une maison voisine. Ils contemplerent avec grand
plaisir les inutiles efforts qu'il fit pour sortir; ils le tinrent
longtemps prisonnier, et voulaient, dit-on, le forcer a parlementer en
repondant a de certaines questions, moyennant quoi on l'aurait mis en
liberte. Il resta muet a tous les appels, a toutes les plaisanteries, et
se tint tout le jour tranquille comme s'il eut ete mort. Les vauriens
d'assiegeants deciderent qu'on le prendrait par la famine, et qu'on
monterait la garde toute la nuit; on posa des postes autour de la
maison, et on les releva d'heure en heure comme des factions militaires.
Mais le captif, desespere, fit une sortie a laquelle on ne s'attendait
pas, et s'evada par les toits d'une maniere qu'on dit miraculeuse de
hardiesse et de bonheur. On le vit passer comme une ombre dans les airs,
mais on ne put le joindre; et ce matin il a quitte la ville sans qu'on
sache quelle route il a prise. Ton ancien camarade Lorrain, qui est
aujourd'hui chef d'escadron dans les chasseurs de la garde royale, est
venu diner avec nous, et m'a raconte toute l'affaire non sans un certain
plaisir, car il ne t'aime pas infiniment. Je suis monte chez ta femme
aussitot qu'il a ete parti; elle s'etait donnee pour malade toute la
journee et n'avait pas quitte sa chambre. Je lui ai fait une scene de
tous les diables, et elle s'est mise en colere comme un petit demon.
Au lieu de me prier de me taire, elle m'a defie de t'informer de sa
conduite, et m'a declare que je n'avais pas le droit de lui parler
ainsi; que j'etais _un butor_, et qu'elle ne souffrirait pas de toi-meme
les reproches que je lui faisais. S'il en est ainsi, fais comme tu
voudras, je m'en lave les mains; mais ma conscience m'ordonn
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