qui constitue l'adultere, ce n'est pas l'heure qu'elle accorde a son
amant, c'est la nuit qu'elle va passer ensuite dans les bras de son
mari. Oh! je hairais la mienne, et j'aurais pu devenir feroce, si elle
eut offert a mes levres des levres chaudes encore des baisers d'un
autre, et apporte dans mes bras un corps humide de sa sueur. Elle serait
devenue hideuse pour moi ce jour-la, et je l'aurais ecrasee comme une
chenille que j'aurais trouvee dans mon lit. Mais, telle qu'elle est,
pale, abattue, souffrant toutes les angoisses d'une conscience timoree,
incapable de mentir, et toujours prete a se confesser a moi de sa faute
involontaire, je ne puis que la plaindre et la regretter. N'ai-je pas
vu, depuis son retour, que ma confiance apparente lui faisait un mal
affreux, et que ses genoux pliaient sans cesse pour me demander pardon?
Combien il m'a fallu d'adresse et de precaution pour retenir sur ses
levres l'aveu toujours pret a s'en echapper!
Tu m'as demande pourquoi je n'avais pas accepte la confession et le
sacrifice que si souvent elle a desire me faire. C'est parce que je
crois la confession inutile et le sacrifice impossible. Tu n'aimes pas
qu'on doute de la vertu d'autrui, et tu m'as reproche de ne plus vouloir
me fier a l'heroisme dont Fernande eut ete peut-etre capable encore. Eh
quoi! cette derniere epreuve, ce fatal voyage en Touraine, n'a-t-il
pas suffi a mesurer la force de Fernande? Je la connais bien, je sais
jusqu'ou va sa vertu, comme je sais ou elle finit. Sa chastete naturelle
est la meilleure sauvegarde qui puisse la proteger, et sans doute elle
l'a protegee longtemps. Mais la resolution de perdre a jamais Octave ne
peut se soutenir dans cette ame puerilement sensible, que la plus petite
souffrance epouvante, et qui succombe sous un veritable malheur. Est-ce
sa faute? Ne serions-nous pas des insenses et des bourreaux, si nous
exigions d'elle ce qu'elle ne peut accorder, si nous la frappions pour
marcher quand ses jambes se derobent sous elle? N'a-t-elle pas failli
mourir parce qu'elle a perdu sa fille? Pauvre creature souffrante!
sensitive qui se crispe au souffle de l'air! comment aurais-je le
courage brutal de te tourmenter, et l'orgueil stupide de te mepriser
parce que Dieu t'a faite si faible et si douce! Oh! je t'ai aimee,
simple fleur que le vent brisait sur sa tige, pour ta beaute delicate
et pure, et je t'ai cueillie, esperant garder pour moi seul ton suave
parfum, qui s'exhalait a l'ombre et d
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