mnies qui ne
t'atteignent pas, et te venger d'insultes qu'on n'ose t'adresser que
de loin? En vain tu t'efforces de me prouver que ta vie n'est utile
desormais a personne, tu te trompes. Oh! ne laisse pas le courage
t'abandonner ainsi! c'est un calcul de le paresse, qui veut se croiser
les bras, que de se persuader que la tache est finie. Pourquoi
condamnes-tu ton fils avec ce desespoir? le medecin ne t'a-t-il pas dit
que la nature operait des miracles au-dessus de toutes les previsions de
la science, et qu'avec des soins assidus et un regime severe, ton enfant
pouvait se fortifier? Je maintiens ce regime scrupuleusement, et depuis
quelques jours notre cher petit est reellement bien. Si je mourais
moi-meme, qui le soignerait? Fernande ignore son mal, et d'ailleurs sa
sollicitude est presque toujours inhabile. Qui m'impose donc la vie
quand tu te demets si facilement de la tienne. Crois-tu qu'elle soit
bien belle, celle que tu me laisses?
Et Fernande, n'a-t elle plus besoin de toi? que savons-nous d'Octave,
quand il ne sait rien de lui-meme, et se pique de ne resister a aucun
des caprices qui lui viennent? Il se dit sur d'aimer toujours Fernande;
c'est peut-etre vrai, c'est peut-etre faux. Il s'est bien conduit depuis
qu'il l'a compromise; mais quel homme est-ce la pour te succeder et
pour remplir un coeur ou tu as regne? Pourra t-elle l'aimer longtemps?
n'aura-t-elle pas besoin un jour qu'on la delivre de lui?
Tu veux que je te dise exactement la verite sur leur compte, et je sens
que je dois le faire; dans ce moment ils sont heureux, ils s'aiment avec
emportement, ils sont aveugles, sourds et insensibles. Fernande a des
moments de reveil et de desespoir, Octave a des instants d'effroi et
d'incertitude; mais ils ne peuvent resister au torrent qui les entraine.
Octave cherche a rassurer ta conscience en rabaissant ta vertu; il
n'oserait en douter, mais il tache de l'expliquer par des motifs qui en
diminuent le merite; pour se dispenser de t'admirer et pour se consoler
d'etre moins grand que toi, il tache de saper le piedestal ou tu as
merite de monter. Tu as devine juste, il nie tes passions, afin de nier
ton sacrifice. Fernande te defend avec plus de vigueur que tu ne penses,
et sa veneration resiste a toutes les atteintes. Elle dit que tu l'aimes
au point de rester aveugle eternellement; elle dit qu'en cela tu es
sublime: et alors elle pleure si amerement que je suis forcee de la
consoler et de la relever a ses prop
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