la conduisant vers Sylvia:
"Si ce n'est pas ma soeur, lui dit-il, c'est du moins la tienne;
embrasse-la, et oublie ta mere, qui vient de se perdre par sa faute."
Madame de Theursan tomba dans d'affreuses convulsions. On l'emporta dans
la chambre de sa fille; mais au moment de suivre Fernande, qui etait
sortie pour aller soigner sa mere, Sylvia s'arreta entre Jacques et moi,
en nous prenant chacun par un bras: "Jacques, dit-elle, tu as ete trop
loin, et tu n'aurais pas du dire cela devant Fernande et devant moi. Je
suis bien fachee de savoir que c'est la ma mere; j'esperais que celle
qui m'a abandonnee en me donnant le jour, etait morte. Heureusement
Fernande n'a du rien comprendre a cette scene, et il sera facile de lui
faire croire qu'en m'appelant sa soeur vous faisiez simplement un appel
a mon amitie.--Qu'elle en pense ce qu'elle pourra, il ne convient a
personne ici de lui expliquer ces tristes secrets. Octave les gardera
religieusement.--D'autant plus volontiers, lui dis-je, que je ne sais
rien, et que je ne devine pas plus que Fernande." Nous nous separames,
et Sylvia passa le reste de la journee dans la chambre de madame de
Theursan. Fernande, malade elle-meme, avait ete forcee d'aller se mettre
au lit aussitot qu'elle avait vu sa mere un peu calmee. Sylvia les a
soignees alternativement avec un zele admirable. Apres-tout, c'est une
grande et noble creature que Sylvia. Je ne sais ce qui s'est passe entre
elle et madame de Theursan; mais lorsque celle-ci repartit le lendemain
matin sans consentir a voir personne, elle se laissa accompagner par
Sylvia jusqu'a sa voiture. Je les vis passer dans le parc, d'un endroit
ou elles ne pouvaient m'apercevoir. Madame de Theursan semblait etre
accablee, et n'avoir plus de forces pour la colere et le ressentiment.
Au moment de quitter Sylvia, pour aller rejoindre sa voiture qui
l'attendait a la grille, elle lui tendit la main; puis, apres un instant
d'hesitation, elle se jeta dans ses bras eu sanglotant. J'entendis
Sylvia lui offrir de l'accompagner pendant une partie de la route, pour
la soigner. "Non, dit madame de Theursan, votre vue me fait trop de mal;
mais si je vous appelle a ma derniere heure, promettez-moi de venir me
fermer les yeux.--Je vous le jure, repondit Sylvia; et je vous jure
aussi que Fernande ne saura jamais votre secret.--Et ce jeune homme le
gardera? ajouta madame de Theursan en parlant de moi; pardonnez-moi, car
je suis bien malheureuse!--J'ai quelque ch
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