tion la plus profonde et "La Blanche" pleurant a
chaudes larmes.
--Qu'y a-t-il? s'ecria Sefietje interdite.
Aucune ne parut empressee de repondre. La vieille Natse en pleurant leva
les bras au ciel, comme pour dire que, cette fois-ci, c'etait la fin de
tout. Lotje, Sidonie et Victorine restaient muettes, les joues brulantes,
la tete penchee sur leur ouvrage; seule, Mietje Compostello declara de sa
voix profonde et caverneuse que le monde etait bien perverti et qu'on ne
pouvait plus avoir confiance en personne. Enfin, l'une d'elles avoua:
Poeteken, l'infame hypocrite, que toutes croyaient l'innocence meme, avait
seduit "La Blanche" et "La Blanche" allait avoir un gosse.
--Eh bien, c'est du propre! Eh bien, c'est du propre! s'exclama Sefietje,
etourdie de stupefaction.
"La Blanche" fut prise d'une crise de larmes, comme si tout entiere elle
allait fondre.
--Qui l'aurait jamais pense! Qui l'aurait jamais pense! gemissait-elle.
--Mais, voyons, Zulma, s'ecria Sefietje rouge d'indignation et de honte,
tu pouvais bien penser que ca finirait mal, en te conduisant ainsi!
Toute sa vie, Sefietje etait restee une vierge austere et reveche; la
rupture de ses fiancailles avec Bruteyn, jadis, l'avait aigrie pour
toujours. Elle etait l'ennemie de l'amour, l'ennemie de la reproduction
et de tout ce qui s'y rapportait, de pres ou de loin. A ses yeux, ce qui
arrivait a "La Blanche" etait une abomination. Elle en rejetait la faute
entierement sur "La Blanche", parce que, declarait-elle avec une rage
haineuse et sourde, tous les hommes sont des coquins; il n'en existe
peut-etre pas cent dans le monde entier qui ne chercheraient pas a
tromper une femme, autant de fois qu'ils en ont l'occasion, ce que
"La Blanche" savait aussi bien qu'elle-meme.
--Est-ce qu'il parle au moins de mariage? demanda-t-elle sur un ton un
peu moins vindicatif.
"La Blanche" fut secouee d'une nouvelle crise.
--Il voudrait bien, mais sa mere s'y oppose, repondit-elle a travers ses
sanglots. Sefietje leva les bras au ciel.
--Alors vous etes perdus tous les deux! annonca-t-elle. Jamais M. de
Beule ne tolerera pareil scandale dans sa fabrique!
Brusquement, de gros sanglots s'entendirent derriere le dos de Sefietje.
Toutes les femmes se retournerent et virent avec effroi et stupefaction
la belle Sidonie pleurant a chaudes larmes. Elle etait la, affaissee,
comme sous le poids d'une douleur effrayante, soudaine, et les pleurs
coulaient sur ses mains
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