le eut une terreur folle lorsqu'elle vit son maitre devant elle;
ses yeux se refermerent et sa tete retomba en arriere.
--Sefie! Sefie! Tu ne peux pas!... s'ecria Lotje comme si la vieille
servante le faisait expres.
Bouleverse, M. de Beule ne savait plus a quel saint se vouer. On eut dit
qu'il avait peur de Sefietje.
--Il faut la faire tenir tranquille, bien tranquille, begaya-t-il.
Et, tout inquiet, il prit la porte, pendant que Victorine revenait a pas
precipites avec une gamelle d'eau. Sefietje reprit ses sens. Elle but
une gorgee d'eau fraiche et regarda autour d'elle d'un air egare.
--Ca va mieux, Sefietje? demanda Lotje d'une voix douce.
Sefietje fit un signe de tete affirmatif. Oui, cela allait un petit peu
mieux. M. de Beule la regarda encore un instant avec des yeux pleins
d'inquietude, puis il partit sur la pointe du pied en fermant avec
precaution la porte derriere lui.
Juste devant les fenetres, il rencontra M. Triphon avec Kaboul, et les
femmes, a peine delivrees, eprouverent de nouveau une terrible angoisse.
Sans savoir pourquoi, elles s'attendaient a une scene epouvantable entre
le pere et le fils, la devant elles. Il n'en fut rien, heureusement. M.
de Beule, faisant de la main un geste dans la direction de la "fosse aux
femmes", parut dire quelque chose a M. Triphon, qui, a son tour, regarda
d'un air alarme du cote de l'atelier. Sans doute M. de Beule
l'avertissait-il de n'y pas entrer en ce moment. Le pere et le fils
resterent la un instant immobiles, pendant que les deux chiens
s'entreflairaient comme des etrangers. Puis chacun s'en fut de son cote.
Alors, dans leur "fosse", les femmes purent respirer.
VI
Le lendemain matin, toute la fabrique savait l'histoire. La veille au
soir, les femmes entre elles avaient fait le serment solennel de n'en
rien dire a personne; et nul ne comprenait comment elle avait pu
s'ebruiter. Mais des huit heures, au moment ou les hommes prenaient leur
dejeuner dans la cour, tous connaissaient le passionnant secret. Les
"huiliers" le savaient, les "cabris" des meules verticales le savaient,
Bruun, le chauffeur, le savait; jusqu'a Pee, le meunier, qui turbinait
toujours, comme un grand hanneton saupoudre de farine, dans un coin de
la fabrique et par la meme souvent exclu des confidences, n'ignorait
rien. Un peu avant la demie apparurent dans la cour Justin-la-Craque et
son aide Komel portant une barre de fer; ils le savaient aussi. Et,
lorsque vers
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