. C'est moi qui m'en charge. Seulement, je
dois vous prevenir d'une chose... c'est que si vous ne connaissez pas
le roi, le roi vous connait parfaitement. Je lui ai dix fois raconte la
maniere dont vous m'avez aide a sortir de Paris. Mordieu! ce fut un beau
fait d'armes! Je vous vois encore levant haut votre rapiere et donnant
le signal de la marche en avant. Je vous entends encore crier:
Trompettes, sonnez la marche royale!...
--Vous me voyez bien content de votre amitie, fit gravement le
chevalier; bien content et bien honore, car ce n'est pas en vain qu'on
vous appelle le Brave Crillon. Donc, puisque cela vous agree, je vous
attendrai ce soir en mon hotellerie dont vous voyez d'ici l'enseigne.
--L'hotellerie du Chateau, fit Crillon; je connais cela; on y boit
d'excellent Andresy.
--A quelle heure vous attendrai-je?
--Mais entre le service de jour et le service de nuit, c'est-a-dire que
je serai libre environ de six a sept heures du soir. Nous arreterons le
jour ou vous desirez etre presente a Sa Majeste...
La-dessus les deux hommes se serrerent les mains, et Crillon continua sa
ronde autour du chateau.
Cependant, Pardaillan etait rentre a l'hotellerie. Dans sa chambre, un
homme l'attendait, assis aupres du feu qu'il regardait fixement, comme
s'il eut cherche dans les braises ardentes un signe quelconque de sa
destinee. Cet homme, c'etait Jacques Clement. Il portait ce costume de
drap noir que nous lui avons vu et qui lui donnait une sorte d'elegance
funebre. A l'entree de Pardaillan. le moine releva vivement la tete et
sourit.
--Savez-vous qui je recois a diner ce soir? fit Pardaillan.
--Comment le saurais-je, mon ami?
--Crillon. Le brave Crillon en personne. C'est-a-dire le gouverneur du
chateau de Blois.
Negligemment, il ajouta:
--Crillon doit me presenter au roi...
Jacques Clement tressaillit, regarda fixement le chevalier comme pour
l'interroger, puis baissant sa tete pensive:
--Pardaillan, dit-il, il se passe en ce moment des choses que je ne
comprends pas. Pardaillan, qu'est-ce que le frere portier des jacobins
etait venu faire a Blois?
--Ca, je n'en sais rien, mon ami...
--Pardaillan, qui a tue frere Timothee?
--D'abord, etes-vous bien sur que le cadavre des fosses fut celui de ce
digne moine?
--Parfaitement sur, et vous-meme, Pardaillan, l'avez reconnu, bien que
vous n'ayez vu cet homme que peu d'instants...
--Oui, ce fut lui qui me conduisit a vous.
--Rien ne m'ot
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