"dilettante". Il aime a
croire, et il prend les idees au serieux; il est convaincu, et il est
pratique. Ce qu'il dit, il le croit toujours, et ce menteur effronte
dans la vie sociale est un sincere dans la vie intellectuelle. Et ce
qu'il croit, il le croit jusqu'aux resultats, inclusivement; il desire
qu'il passe dans l'opinion des hommes, et de leurs opinions dans
leurs actes; il _veut_ ce qu'il pense, ce qui en fait le contraire du
dilettante, qui pense ce qu'il veut. Tout a l'oppose du sceptique il a
conviction facile; et tout a l'oppose du dilettante il a la conviction
imperieuse et visant a l'acte. Seulement ses convictions sont multiples,
fugaces, contradictoires et aussi inconsistantes qu'elles sont sures
d'elles-memes. Il est de ceux dont on a dit qu'ils changent souvent
d'idee fixe. Reprenons, en effet, et examinons dans le detail.
Est-il optimiste? J'ai deux lecteurs: l'un certainement va me repondre
oui, l'autre non, selon le livre de Voltaire, _Mondain_ ou _Candide_,
qui l'aura le plus frappe. Voltaire trouve le monde mauvais (_Candide_),
et la societe bonne (_Mondain_); ou le monde bon (_Histoire de Jenni_),
et la societe mauvaise (_Dictionnaire philosophique_, "_Mechants_").
Il veut que l'homme se trouve heureux (_Mondain_) et il veut qu'il se
meprise (_Marseillais et Lion_). Tres souvent vous le prenez pour un
pur Condorcet, optimiste beat qui touche de la main le progres et la
realisation prochaine de toutes les promesses du progres. Il vous dira:
"J'ose prendre le parti de l'humanite contre ce misanthrope sublime
(Pascal); j'ose assurer que nous ne sommes ni si mechants ni si
malheureux qu'il le dit..." Et ceci est la tradition de Vauvenargues et
le pressentiment de Condorcet, et la transition de l'un a l'autre.--Il
vous dira: "C'est une etrange rage que celle de quelques messieurs
qui veulent absolument que nous soyons miserables. Je n'aime point un
charlatan qui veut me faire accroire que je suis malade pour me
vendre ses pilules. Garde la drogue, mon ami..." Et ceci est contre
Jean-Jacques, ou Pascal, et dit dans la crainte que le pessimisme ne
conduise a la religion, comme a ce qui le justifie a la fois, et le
repare.--Il vous dira: "L'homme n'est point ne mechant; il le devient,
comme il devient malade... Assemblez tous les enfants de l'univers; vous
ne verrez en eux que l'innocence, la douceur et la crainte... L'homme
n'est pas ne mauvais: pourquoi plusieurs sont-ils infectes de cette
maladie, c'
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