des agents de police passer et repasser; il y en
a aussi d'autres au coin de la rue du Bac; ils ont l'air de vouloir se
cacher. C'est la Revolution.
J'etais peu dispose a me laisser distraire de mes tristes pensees;
cependant, cette insistance de Felix m'amena a la fenetre de la salle
a manger, et a la lueur des becs de gaz, je vis en effet des groupes
sombres qui paraissaient postes en observation. Bien qu'ils fussent
caches dans l'ombre, on pouvait reconnaitre des sergents de ville.
Plusieurs leverent la tete vers notre fenetre eclairee. Au coin de la
rue du Bac, un afficheur etait occupe a coller de grands placards dont
la blancheur brillait sous la lumiere du gaz.
Il etait certain que ces agents etaient places la, dans cette rue
tranquille, pour accomplir quelque besogne mysterieuse.
Mais laquelle? je n'avais pas l'esprit en etat d'examiner cette
question. Je rentrai dans la chambre et repris ma place pres de mon
pere.
Au bout d'un certain temps Felix revint de nouveau, et comme je faisais
un geste d'impatience pour le renvoyer, il insista.
--On assassine le general Bedeau, dit-il, ils sont entres dans la
maison.
En effet, on entendait un tumulte dans l'escalier, un bruit de pas
precipites et des eclats de voix.
Assassiner le general Bedeau! Mon premier mouvement fut de me lever
precipitamment et de courir sur le palier. Mais je n'avais pas fait cinq
pas que la reflexion m'arreta. C'etait folie. Des agents de police ne
pouvaient pas s'etre introduits dans la maison pour porter la main sur
un homme comme le general. Felix etait affole par la peur.
Mais le tapage qui retentissait dans l'escalier avait redouble. J'ouvris
la porte du palier.
--A la trahison! criait une voix forte.
Puis, en meme temps, on entendait des pietinements, des fracas de
portes, le tumulte d'une troupe d'hommes, tout le bruit d'une lutte.
Je descendis vivement. D'autres locataires de la maison etaient sortis
comme moi; plusieurs portaient des lampes et des bougies qui eclairaient
l'escalier.
--Oserez-vous arracher d'ici, comme un malfaiteur, le general
Bedeau, vice-president de l'Assemblee, dit le general aux agents qui
l'entouraient?
A ce moment le commissaire de police, qui etait a la tete des agents, se
jeta sur le general et le saisit au collet.
Les agents suivirent l'exemple qui leur etait donne par leur chef et, se
ruant sur le general, le saisissant aux bras, le tirant, le poussant,
l'entrainerent au bas d
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