e l'escalier avec cette rapidite brutale que
connaissent seulement ceux qui ont vu operer la police.
--A moi! a moi! criait le general.
Descendant rapidement derriere les agents, j'etais arrive aux dernieres
marches de l'escalier comme ils s'engageaient sous le vestibule, je
voulus m'elancer au secours du general, mais deux agents se jeterent
devant moi et me barrerent le passage.
--A l'aide! criait le general, se debattant toujours, a moi, a moi, je
suis le general Bedeau.
--Mettez-lui donc un baillon, cria une voix.
Les agents m'avaient saisi chacun par un bras, je voulus me degager,
mais ils etaient vigoureux, et je ne pus me debarrasser de leur
etreinte.
--Ne bougez donc pas, dit l'un d'eux, ou l'on vous enleve aussi.
Le general et le groupe qui l'entrainait etaient arrives dans la rue, et
l'on entendait toujours la voix du general, s'adressant sans doute aux
passants qui s'etaient arretes.
--Au secours, citoyens! on arrete le vice-president de l'Assemblee; je
suis le general Bedeau.
Je parvins a me degager en repoussant l'un des agents et en trainant
l'autre avec moi.
Mais comme j'arrivais sous le vestibule, la porte de la rue se referma
avec violence et en meme temps on entendit une voiture qui partait au
galop.
Il etait trop tard, le general etait enleve. Mes deux agents s'etaient
jetes de nouveau sur moi. En entendant ce bruit, ils me lacherent.
--Ca se retrouvera, dit l'un d'eux en me montrant le poing.
Puis, comme ils avaient d'autre besogne pressee, ils se firent ouvrir la
porte, et s'en allerent sans m'emmener avec eux.
Je remontai l'escalier, et, en arrivant sur le palier de l'appartement
du general, je trouvai le domestique de celui-ci qui se lamentait au
milieu d'un groupe de curieux.
--C'est ma faute, disait-il, faut-il que je sois maladroit! quand le
commissaire a sonne, je l'ai pris pour M. Valette, le secretaire de la
presidence de l'Assemblee, et je l'ai conduit a la chambre du general.
Ils vont le fusiller. Ah! mon Dieu! c'est moi, c'est moi!
Ainsi le coup d'Etat s'accomplissait par la police, et c'etait en
faisant arreter les representants chez eux que Louis-Napoleon voulait
prendre le pouvoir.
En reflechissant un moment, j'eus un soupir de soulagement egoiste:
l'armee ne se faisait pas la complice de Louis-Napoleon; l'honneur au
moins etait sauf.
Le recueillement et la douleur sans emotions etrangeres n'etaient plus
possibles; les bruits de la rue montaien
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