i unissent les hommes et
manquent aux autres animaux, comme celles qui leur sont communes avec
les autres animaux, sont egalement reelles. Il y a donc une nature
humaine, l'idee de la nature humaine n'est point une hypothese, une
chimere; elle est fondee sur des realites, et puisqu'il y a des realites
au fond des idees de cette sorte, c'est-a-dire au fond des idees de
genres et d'especes, il y a un certain realisme.
Cela est vrai, si le realisme signifie cette opinion meme, savoir que
les idees de genres et d'especes, loin d'etre des fictions ou de pures
conditions subjectives de notre pensee, sont l'expression intellectuelle
de faits positifs et certains. Ce realisme-la n'est que le contraire
du scepticisme et de l'idealisme. Sur ce point, le sens commun est
realiste. Mais, qu'on nous permette de le dire, ce n'est pas la
le realisme. Le realisme etait plus hardi. Les idees de genres et
d'especes, etant fondees sur des faits reels, peuvent etre appelees des
idees reelles, et en ce sens il est tout simple de dire abreviativement
que les genres et les especes sont reels. Mais sont-ils en eux-memes des
realites, c'est-a-dire quelque chose d'autre que, d'une part, les
faits reels manifestes dans les individus, de l'autre, les conclusions
legitimes que nous induisons de ces faits reels, generalisations
necessaires de l'intelligence. Le realisme est alle jusqu'a regarder
les idees de genre et d'espece comme correspondant objectivement a des
essences, ontologiquement distinctes des individus dans lesquels elles
se manifestent.
Sans doute, l'objection de M. Cousin ne va pas si loin; c'est une
reserve generale en faveur du platonisme; c'est surtout l'expression
d'une louable crainte de donner acces ou pretexte au scepticisme. Mais
ce n'est en definitive qu'une reclamation incontestable en faveur de la
verite de l'idee d'essence.
Oui, il y a dans les etres individuels autre chose que de
l'individualite. On peut, on doit dire sans subtilite: il n'y a que
des individus, et il y a quelque chose de plus que des individualites.
Ainsi, bien qu'il n'existe en fait d'humanite que des hommes, il est une
essence qui s'appelle la nature humaine. Mais la nature humaine ne se
realise que dans les individus; des que l'essence arrive a l'existence,
elle s'individualise. L'etre en puissance peut etre general, l'etre en
acte est individu.
Or maintenant, cette realite des faits sur lesquels se fondent les idees
de genre et d'espace, cette
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