vec une extreme douleur les maux de l'Eglise se perpetuer par la
guerre cruelle que le pape et l'empereur se faisaient l'un a l'autre,
et qui produisirent meme des deux cotes, des conjurations contre leurs
propres personnes.
Henri, landgrave de Thuringe, apres la deposition de Frederic, avait ete
elu empereur en sa place par les archeveques de Cologne et de Mayence,
et par quelques autres princes de l'empire. Depuis son election, Henri
avait remporte une victoire sur Conrad, fils de Frederic, auquel, par
cette circonstance, le pape etait devenu plus redoutable qu'auparavant.
Frederic espera que Louis, dans la conjoncture du grand service qu'il
allait rendre a la religion, pourrait, par de nouvelles instances,
gagner quelque chose sur l'esprit du souverain pontife. Il ecrivit
au roi pour lui demander de nouveau sa mediation. Il lui donna plein
pouvoir d'offrir en son nom au pape toutes sortes de soumissions, et
d'aller consacrer le reste de ses jours au service de Dieu dans la
Palestine, a condition seulement que le pape lui donnat l'absolution, et
qu'il fit empereur, a sa place, son fils Conrad.
Ces offres avaient de quoi toucher, ou du moins eblouir le pape, mais
il ne craignait guere moins le fils que le pere; et, dans une entrevue
qu'il eut avec le roi, a Cluny, il lui repondit que c'etait la un des
artifices ordinaires de Frederic, auquel il etait bien resolu de ne pas
se laisser surprendre; que les parjures de ce prince devaient lui avoir
ote toute creance, qu'au reste il s'agissait de la cause de l'Eglise,
dans laquelle rien n'ebranlerait jamais sa fermete.
Le roi lui repliqua que, quelque grandes que fussent les fautes que
Frederic avait commises contre l'Eglise, on ne devait point lui oter
toute esperance de pardon; que Jesus-Christ, dont les papes etaient les
vicaires sur la terre, avait ordonne de pardonner autant de fois que le
pecheur se reconnaitrait; que la reconciliation de ce prince etait de la
derniere importance pour le bien de l'Eglise, et en particulier pour la
guerre sainte; que Frederic etait le maitre de la Mediterranee, et qu'il
etait en etat de beaucoup contribuer au succes de cette entreprise, ou
de beaucoup y nuire. Ecoutez mes prieres, lui dit le saint roi, celles
de tant de milliers de pelerins qui attendent un passage favorable,
celles enfin de toute l'Eglise qui vous demande par ma voix de ne pas
rejeter des soumissions que Dieu ne rejette peut-etre pas. Tout ce qu'il
put dire fut inu
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