es jours, afin de blanchir mes chemises, car
elles sont horriblement sales, et j'espere qu'en bons camarades, vous
ne me refuserez pas cela." Le meme soir, il les emmena; il est
probable qu'elles blanchirent toutes les chemises des officiers, car
elles ne revinrent que sept jours apres.
Le 1er octobre, un fort detachement du regiment fut commande pour
aller fourrager a quelques lieues de Moscou, dans un grand chateau
construit en bois. Nous y trouvames fort peu de chose: une voiture
chargee de foin fut toute notre capture. A notre retour, nous
rencontrames la cavalerie russe qui vint caracoler autour de nous,
sans cependant oser nous attaquer serieusement. Il est vrai de dire
que nous marchions d'une maniere a leur faire voir qu'ils n'auraient
pas eu l'avantage, car, quoiqu'etant infiniment moins nombreux qu'eux,
nous leur avions mis plusieurs cavaliers hors de combat. Ils nous
suivirent jusqu'a un quart de lieue de Moscou.
Le 2, nous apprimes que l'Empereur venait de donner l'ordre d'armer le
Kremlin; trente pieces de canon et obusiers de differents calibres
devaient etre places sur toutes les tours tenant a la muraille qui
forme l'enceinte du Kremlin.
Le 3, des hommes de corvee de chaque regiment de la Garde furent
commandes pour piocher la terre et transporter des materiaux provenant
de vieilles murailles que des sapeurs du genie abattaient autour du
Kremlin, et des fondations que l'on faisait sauter par la mine.
Le 4, j'accompagnai a mon tour les hommes de corvee que l'on avait
commandes dans la compagnie. Le lendemain au matin, un colonel du
genie fut tue, a mes cotes, d'une brique qui lui tomba sur la tete,
provenant d'une mine que l'on venait de faire sauter. Le meme jour, je
vis, pres d'une eglise, plusieurs cadavres qui avaient les jambes et
les bras manges, probablement par des loups ou par des chiens; ces
derniers se trouvaient en grande quantite.
Les jours ou nous n'etions pas de service, nous les passions a boire,
fumer et rire, et a causer de la France et de la distance dont nous
etions separes, et aussi de la possibilite de nous en eloigner encore
davantage. Quand venait le soir, nous admettions dans notre reunion
nos deux esclaves moscovites, je dirai plutot nos deux marquises, car,
depuis notre bal, nous ne leur disions plus d'autres noms, qui nous
tenaient tete a boire le punch au rhum de la Jamaique.
Le reste de notre sejour dans cette ville se passa en revues et
parades, jusqu'au jour ou
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