i de mille manieres. Je me croyais, je me suis
cru, pendant dix ans, en devoir de la relever et de la proteger. Enfin
elle a mis le comble a son ingratitude et a sa perfidie, et j'ai pu
l'abandonner, l'oublier, et disposer de moi-meme. Eh bien, cette femme que
je croyais en Angleterre, je l'ai retrouvee a Florence au moment ou
Laurent devait partir. Abandonnee d'un nouvel amant qui m'avait succede,
elle voulait et comptait me reprendre: tant de fois deja elle m'avait
trouve genereux ou faible! Elle m'ecrivait une lettre de menaces, et,
feignant une jalousie absurde, elle pretendait venir vous insulter en ma
presence. Je la savais femme a ne reculer devant aucun scandale, et je ne
voulais, pour rien au monde, que vous fussiez seulement temoin de ses
fureurs. Je ne pus la decider a ne pas se montrer, qu'en lui promettant
d'avoir une explication avec elle le jour meme. Elle demeurait precisement
dans l'hotel ou nous logions aupres de notre malade, et, quand le voiturin
qui devait emmener Laurent arriva devant la porte, elle etait la, resolue
a faire un esclandre. Son theme odieux et ridicule etait de crier, devant
tous les gens de l'hotel et de la rue, que je partageais ma nouvelle
maitresse avec Laurent de Fauvel. Voila pourquoi je vous fis partir avec
lui, et pourquoi je restai, afin d'en finir avec cette folle sans vous
compromettre, et sans vous exposer a la voir ou a l'entendre. A present,
ne dites plus que j'ai voulu vous soumettre a une epreuve en vous laissant,
seule avec Laurent. J'ai assez souffert de cela, mon Dieu, ne m'accusez
pas! Et, quand je vous ai crue partie avec lui, toutes les furies de
l'enfer se sont mises apres moi.
--Et voila ce que je vous reproche, dit Therese.
--Ah! que voulez-vous! s'ecria Palmer, j'ai ete si odieusement trompe dans
ma vie! Cette miserable femme avait remue en moi tout un monde d'amertume
et de mepris.
--Et ce mepris a rejailli sur moi?
--Oh! ne dites pas cela, Therese,
--Moi aussi pourtant, reprit-elle, j'ai ete bien trompee, et je croyais en
vous quand meme.
--Ne parlons plus de cela, mon amie, je regrette d'avoir ete force de vous
confier mon passe. Vous allez croire qu'il peut reagir sur mon avenir, et
que, comme Laurent, je vous ferai payer les trahisons dont j'ai ete
abreuve. Voyons, voyons, ma chere Therese, chassons ces tristes pensees.
Vous etes ici dans un endroit a donner le _spleen_. La barque nous attend;
venez vous etablir a la Spezzia.
--Non, dit T
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