juillet, en depit d'une
chaleur devorante. Je me suis attachee comme un coquillage a ce rocher ou
jamais un arbre n'a pu songer a pousser, mais ou soufflent des brises
energiques et vivifiantes. Ce climat est dur mais sain, et la vue
continuelle de la mer, que je ne pouvais souffrir autrefois, m'est devenue
en quelque sorte necessaire. Le pays que j'ai derriere moi, et qu'en moins
de deux heures je peux gagner en barque, etait ravissant au printemps. En
s'enfoncant dans les terres au fond du golfe, a deux ou trois lieues de la
cote, on decouvre les sites les plus etranges. Il y a une certaine region
de terrains dechires par je ne sais quels anciens tremblements de terre,
qui presente les accidents les plus bizarres. C'est une suite de collines
de sable rouge recouvertes de pins et de bruyeres, s'echelonnant les unes
sur les autres, et offrant sur leurs cretes d'assez larges voies
naturelles qui tout a coup tombent a pic dans les abimes et vous laissent
fort embarrasse de continuer. Si l'on revient sur ses pas et que l'on se
trompe dans le dedale des petits sentiers battus par les pieds des
troupeaux, on arrive a d'autres abimes, et nous sommes restes quelquefois,
Palmer et moi, des heures entieres sur ces sommets boises, sans retrouver
le chemin qui nous y avait amenes. De la, on plonge sur une immensite de
pays cultive, coupe de place en place avec une sorte de regularite par ces
accidents etranges, et au dela de cette immensite se deploie l'immensite
bleue de la mer. De ce cote-la, il semble que l'horizon n'ait pas de
limites. Du cote du nord et de l'est, ce sont les Alpes Maritimes, dont
les cretes, hardiment dessinees, etaient encore couvertes de neige quand
je suis arrivee ici. "Mais il n'est plus question de ces savanes de cistes
en fleurs et de ces arbres de bruyere blanche qui repandaient un parfum si
frais et si fin aux premiers jours de mai. C'etait alors un paradis
terrestre: ces bois etaient pleins de faux ebeniers, d'arbres de Judee, de
genets odorants et de cytises etincelant comme de l'or au milieu des noirs
buissons de myrte. A present, tout est brule, les pins exhalent une odeur
acre, les champs de lupin, si fleuris et si parfumes naguere, n'offrent
plus que des tiges coupees, noires comme si le feu y avait passe; les
moissons enlevees, la terre fume au soleil de midi, et il faut se lever de
grand matin pour se promener sans souffrir. Or, comme il faut d'ici quatre
heures au moins, tant en barque que sur l
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