en effet, recevoir quelque coup mortel.
--Tu ne sais rien, dit-il avec un air de mystere. On voulait assassiner
le Torero. C'est pour lui qu'on s'est battu. Heureusement ses partisans
l'ont enleve, et maintenant, bien cache, il est hors de l'atteinte de
ses ennemis.
--Sainte Vierge! que me dis-tu la? fit-elle, vivement interessee.
--Ce n'est pas tout. La rebellion dont tu as entendu parler, c'etait en
faveur de don Cesar. On dit qu'il est le fils du roi; c'est lui qui est,
parait-il, le legitime enfant et c'est lui qu'on voulait placer sur le
trone a la place de son pere, le roi Philippe, lui qu'on acclamait sous
le nom de roi Carlos.
Il paraissait tres fier de savoir tout cela, fier surtout de connaitre
personnellement un homme qu'on pretendait fils du roi.
Elle, du coup, en oublia et sa feinte colere et son reel depit, et
joignant ses petites mains:
--Don Cesar, fils du roi! s'exclamait-elle. Eh bien, a dire vrai, cela
ne m'etonne pas. J'ai toujours pense qu'il devait etre de tres haute
naissance. Et tu dis qu'il est l'infant legitime? Qui donc osait
attenter a sa vie?
--Le roi... son pere, dit Chico en baissant la voix.
--Son pere! Est-ce possible? fit-elle incredule. Il ne savait pas, sans
doute.
--Il savait, au contraire. C'est meme pour cela qu'il voulait le faire
meurtrir. Tout le monde ne sait pas ca, mais moi je le sais. Il y a bien
des choses que je sais, tiens! et personne ne s'en doute.
--Mais pourquoi? C'est horrible, cela, qu'un pere veuille faire tuer son
fils!
--Ah! voila! Ceci, c'est ce qu'on appelle "la raison d'Etat". Je sais
cela aussi.
Malgre elle, elle eut un coup d'oeil admiratif a l'adresse du petit
homme. C'est vrai, tout de meme, qu'il savait des choses que nul ne
soupconnait. Comment s'arrangeait-il pour savoir?
Il reprit tres serieux:
--Je servais de page a don Cesar dans sa course. Tu n'as pas pu savoir,
puisque tu etais partie quand nous sommes entres sur la piste.
Elle savait tres bien. Elle l'avait tres bien vu. N'importe, elle
feignit d'etre surprise. Lui continua:
--Tu comprends que je devais savoir ou on le conduisait. Je l'ai suivi.
C'est la que j'ai ete si mal arrange.
Et avec un soupir de regret:
--J'avais un si beau costume... tout neuf. Si tu m'avais vu! Regarde
donc dans quel etat on l'a mis.
Oui, oui, elle voyait. Elle comprenait aussi. Il ne pouvait plus etre
question de gronder. Il avait fait son devoir en suivant son maitre, le
pet
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