que toutes les dispositions n'etaient pas prises....
--Le president?
--Sans doute. Ce n'est pas de l'Assemblee que viendra un coup d'Etat.
Il a ete un moment ou elle devait faire acte d'energie, c'etait quand,
apres les revues de Satory, dans lesquelles on a crie: Vive l'empereur!
le president et ses ministres en sont arrives a destituer le general
Changarnier. Alors, l'Assemblee devait mettre Louis-Napoleon en
accusation. Elle n'a pas ose parce que, si dans son sein il y a des gens
qui sachent parler et prevoir il n'y en a pas qui sachent agir. Du cote
de Louis-Napoleon, on ne sait pas parler, on n'a pas non plus grande
capacite politique, mais on est pret a l'action, et le moment ou cette
notion va se manifester me parait venu. Les partis, par leur faute, ont
mis une force redoutable au profit de ce pretendant, qui se trouve ainsi
un en-cas pour le pays entre la terreur blanche et la terreur rouge.
L'homme est mediocre, incapable de bien comme de mal, par cette
excellente raison qu'il ne sait ni ce qui est bien ni ce qui est mal.
En dehors de sa personnalite, du but qu'il poursuit, de son interet
immediat, rien n'existe pour lui; et c'est la ce qui le rend puissant et
dangereux, car tous ceux qui n'ont pas de sens moral sont avec lui, et,
dans un coup d'Etat, ce sont ces gens-la qui sont redoutables; rien ne
les arrete. Si on avait su le comte de Chambord favorable aux coquins,
il y a longtemps qu'il serait sur le trone. On parle toujours de la
canaille qui attend les revolutions populaires avec impatience. Je l'ai
vue a l'oeuvre; je ne nierai donc pas son existence; mais, a cote de
celle-ci, il y en a une autre; a cote de la basse canaille, il y a la
haute. Tout ce qu'il y a d'aventuriers, de bohemiens, d'intrigants, de
declasses, de miserables, de coquins dans la finance, dans les affaires,
dans l'armee ont tourne leurs regards vers ce pretendant sans scrupule.
Voyant qu'il n'y avait rien a faire pour eux ni avec le comte de
Chambord, ni avec le duc d'Aumale, ni avec le general Cavaignac, ils ont
mis leurs esperances dans cet homme qui par certains cotes de sa vie
d'aventure leur promet un heureux regne. Il ne faut pas oublier que ce
qui a fait la force de Catilina c'est qu'il etait l'assassin de son
frere, de sa femme, de son fils et qu'il avait pour amis quiconque etait
poursuivi par l'infamie, le besoin, le remords. Quand on a une pareille
troupe derriere soi, on peut tout oser et quelques centaines d'hommes
|