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a encore fait quelque fredaine.
--Vous vous trompez, mon pere, je vous le jure.
Il n'en demanda pas davantage, n'etant pas questionneur de son
naturel, soit qu'il se souciat infiniment peu de ce qui touchait
sa famille, soit qu'il comprit vaguement que ses facons d'agir lui
enlevaient tout droit a la confiance des siens.
--Puisqu'il en est ainsi, reprit-il, d'un ton bourru, allons nous
coucher. J'ai tant pioche aujourd'hui que je suis extenue. Parbleu!
ceux qui pretendent que les affaires sont mortes me font bien rire!
Jamais M. de Thaller n'avait ete en passe de gagner autant d'argent.
Quand il parlait, on obeissait. De telle sorte que Mlle Gilberte se
trouvait avoir toute la nuit devant elle pour reprendre possession
d'elle-meme, repasser dans son esprit les evenements de la soiree, et
deliberer froidement sur le parti qu'elle avait a prendre.
Car il n'y avait pas a s'abuser. Des le lendemain, Mme Favoral
renouvellerait ses instances.
Que lui dire?... Tout?
Mlle Gilberte s'y sentait portee par toutes les aspirations de son
coeur, par la certitude d'une indulgente complicite, par la pensee de
trouver dans une ame amie l'echo de ses joies et de ses douleurs et de
toutes ses esperances.
Oui, mais Mme Favoral etait toujours cette meme femme dont les plus
belles resolutions s'evanouissaient sous les regards de son mari.
Qu'un pretendant se presentat, qu'une lutte s'engageat, comme pour M.
Costeclar, aurait-elle la force de se taire? Non!
Alors, ce serait avec M. Favoral une scene epouvantable. Il irait
peut-etre trouver M. de Tregars. Quel scandale! Car il etait homme
a ne rien menager. Et un nouvel obstacle se dresserait plus
insurmontable que les autres.
Mlle Gilberte songeait aussi aux projets de Marius, a cette partie
terrible qu'il allait jouer, et dont l'issue devait decider de leur
sort. Il lui en avait dit assez, pour qu'elle en comprit tous les
perils, et qu'il pouvait suffire d'une indiscretion pour aneantir
les resultats de plusieurs mois de patience et d'efforts. Parler,
n'etait-ce pas d'ailleurs abuser de la confiance de Marius? Comment
esperer qu'un autre garde un secret qu'on ne sait pas garder soi-meme?
Enfin, apres de longues et penibles hesitations, elle decida que le
silence lui etait impose, et qu'elle ne se laisserait arracher que de
vagues explications.
C'est donc inutilement que le lendemain et les jours qui suivirent,
Mme Favoral essaya d'obtenir cet aveu, qu'elle
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