ble but, celui de satisfaire de vieilles haines, et celui de
rendre impossible un gouvernement qu'elles trahissaient en feignant de
le servir. Je ne nommerai jamais personne a M. de Persigny; mais il
s'eclairera et verra bien!
En attendant, M. le ministre m'a dit qu'il ne punissait pas la pensee,
et je prends acte de cette bonne parole, qui m'a ote tout le scrupule
avec lequel je l'abordais. Je ne sais pas douter d'une bonne parole, et
c'est dans cette confiance que je lui dis que personne n'est coupable
dans le departement de l'Indre. Initiee naturellement, par mes opinions
et la confiance que l'on m'accorde, a toutes les demarches des
republicains, je sais qu'on s'est reuni, _en petit nombre_, qu'on s'est
consulte, qu'on a attendu les nouvelles de Paris, et qu'a celle de
l'abstention volontaire du peuple, chacun s'est retire chez soi en
silence. Je sais que, partie de Paris au milieu du combat, je suis
venue dire a mes amis: "Le peuple accepte, nous devons accepter." Je ne
m'attendais guere a les voir arretes _par reflexion_ quinze jours apres,
et, parmi eux, ceux de la Chatre, qui n'avaient ete a aucune reunion,
attendant mon retour, peut-etre, pour savoir la verite.
S'il en etait autrement, si ce que je dis la n'etait pas vrai, je
n'aurais pas quitte ma retraite, ou personne ne m'inquietait, et mon
travail litteraire, qui me plait et m'occupe beaucoup plus que la
politique, pour venir faire a M. le president et a son ministre un conte
perfide et lache. Je me serais tenue en silence dans mon coin, me disant
que la guerre est la guerre, et que qui va a la bataille doit accepter
la mort ou la captivite. Mais, en presence d'injustices si criantes, ma
conscience s'est revoltee, je me suis demande s'il etait honnete de
se dire: "Tant mieux que la reaction soit odieuse, tant mieux que le
gouvernement soit coupable; on le haira d'autant plus, on le renversera
d'autant mieux." Non! j'ai horreur de ce raisonnement, et, s'il est
politique, alors je n'entends rien a la politique et ne suis pas nee
pour y jamais rien comprendre.
En attendant, le mal se fait et la souffrance tue le corps et l'ame. Le
malheur aigrit les esprits. La defaite exaspere les uns, le triomphe
enivre les autres, les haines de parti s'enveniment, les moeurs
deviennent affreuses, les relations humaines fratricides.
Non, il n'est pas possible de se rejouir de cela et d'y applaudir dans
son coin. En souhaitant que nos adversaires politiques soient le m
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