t guere me promettre cela a moi; mais
vous pourriez le demander avec insistance, et vous l'obtiendriez
certainement.
Je n'ai pas besoin de vous dire que mon coeur en sera penetre de
reconnaissance et d'affection. C'est le votre qui plaidera en vous-meme
beaucoup mieux que moi.
Vous avez dit chez moi que vous partiez pour la campagne; j'espere que
ma lettre vous y parviendra et que vous ecrirez au ministre; vous le
verrez aussi, a votre retour, n'est-ce pas, prince? et j'apprendrai aux
habitants de mon Berry qu'il faut vous aimer comme je vous aime, moi,
avec un coeur qui a l'age maternel, c'est-a-dire celui meilleures
affections.
GEORGE SAND.
[1] Victimes du coup d'Etat du 2 decembre 1851.
CCCXLIII
AU PRINCE LOUIS-NAPOLEON BONAPARTE,
PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE
Paris, 3 fevrier 1852.
Prince,
Dans une entrevue ou l'embarras, et l'emotion m'ont rendue plus prolixe
que je ne me l'etais impose, j'ai obtenu de vous des paroles de bonte
qu'on n'oublie pas. Vous avez bien voulu me dire: "Demandez-moi telle
grace particuliere que vous voudrez."
J'ai eu l'honneur de vous repondre que je n'etais autorisee par personne
a vous implorer. Je n'avais vu personne a Paris, vous etiez ma premiere
visite.
Je n'aurais pu que vous importuner d'un detail en insistant sur les
arrestations operees dans ma province, et dont les consequences ne
me paraissent pas graves, puisque aucun fait d'insurrection ne s'est
produit la, et qu'a supposer la pensee d'une resistance, il est
impossible qu'on veuille chatier la pensee non suivie d'effet, Je
pouvais le craindre en quittant cette province, ou l'autorite semblait
avoir pris a tache de consterner et de desaffectionner la population par
des rigueurs sans motifs serieux. Mais, en vous ecoutant me repondre
avec tant de douceur et d'humanite, je ne pouvais plus conserver
d'inquietude, et je n'avais plus d'autre demarche a faire pour mes
compatriotes de l'Indre, que celle de hater leur elargissement par mes
instances aupres de votre ministre.
Mais, si je me flatte de l'espoir d'obtenir aisement l'absolution pour
des hommes qu'aucune decision n'a encore atteints, je ne suis pas sans
effroi pour ceux sur le sort desquels il a ete statue ailleurs d'une
maniere rigoureuse. J'en ai vu deux aujourd'hui que je sais completement
innocents, si c'est le fait de conspiration que l'on veut chatier, si ce
n'est pas l'opinion... chose impossible, inou
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