u me fait la lecture de quelque roman; Nini, assise sur
la table, brodant aussi; Borie ronflant, le nez dans le calorifere et
pretendant qu'il ne dort plus du tout; Solange le faisant enrager;
Emile[1] disant des sentences. Nous avons ici un temps magnifique, du
soleil chaud, ou un ciel gris et doux. Les amandiers fleurissent, et je
crois que les rossignols vont arriver. Je fais faire des travaux, dont
je ne sais pas m'occuper beaucoup et qui ne me montent pas la tete,
comme ceux qui consument d'impatience et d'activite fievreuse notre bon
Planet. Je l'ai trouve mieux moralement que je ne m'y attendais, mais
bien change, quoique son etat general soit ameliore. Solange va repartir
et me laisse Nini. Elle ira vous voir.
Racontez-moi si vous avez vu l'imperatrice et _quelle mine qu'elle a_.
Puisque Sa Majeste la promene pour la presenter a la population, vous
avez le droit d'exiger qu'on vous la montre.
Bonsoir, mes chers enfants; je m'apercois que je vous ecris sur une
feuille simple. Ce n'est point par paresse, mais l'heure du sommeil
arrive, et, comme j'ai la vertu de me coucher a une heure du matin, je
n'y dois pas deroger. Le progres que j'ai fait de dormir la nuit m'a
remis sur mes pattes. Je me porte tres bien depuis un mois. Et toi,
te trouves-tu bien de l'air de Paris? Il ne vaut certes pas celui du
Coudray; mais la distraction est une compensation, surtout pour les
organisations nerveuses. J'espere que ma grosse Eugenie ne va pas perdre
ses couleurs et son embonpoint berrichons.
Je vous embrasse de coeur tous deux, ainsi que la petite Berthe. Je
donne trois coups de poing a ton gros gars. Engage-le de ma part a ne
pas trop ecrire de lettres, ca pourrait le fatiguer. Une pichenette a
Marquis le rentier[2]; heureux vieillard!
Tout mon monde vous envoie amities, compliments, Hommages.
[1] Emile Aucante.
[2] Le chien de Nohant. adopte par la famille Duvernet.
CCCLXII
SON ALTESSE LE PRINCE NAPOLEON (JEROME) A PARIS
Nohant, 8 fevrier 1853.
Merci, cher prince; j'attendais pour vous envoyer mes actions de graces
que le nom de Patureau parut au _Moniteur_. J'ignore encore s'il y a
figure; car on ne se le procure pas aisement la ou je suis. Mais j'ai
recu de M. Charles Abbattucci la confirmation de votre bonne nouvelle et
j'ai envoye sa lettre comme passeport a mon fugitif. Je l'attends, et il
vous exprimera sa reconnaissance lui-meme probablement, dans son langa
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