alheureusement par
une si etrange philosophie, la fine et spirituelle observation de MM.
Meilhac et Halevy, le mouvement endiable de M. Sardou? Je ne suis pas
aussi fou et aussi injuste qu'on veut le dire. Qu'on me relise, on verra
que j'ai toujours fait la part de chacun, meme lorsque je me suis montre
severe.
Mais ou je me separe completement de M. Sarcey, c'est quand il ajoute:
"Si vous mettez a part ces grands noms de Moliere et de Shakespeare, qui
ne sont que des accidents de genie, vous pouvez courir toute l'histoire
du theatre dans l'univers sans trouver une epoque ou se soient
rencontres a la fois, dans un seul genre, tant d'ecrivains de premier
ordre."
De premier ordre, je le nie absolument. Mettons de second ordre, meme de
troisieme, pour quelques-uns. On le verra plus tard. M. Sarcey obeit a
un sentiment dont les critiques de toutes les epoques ont fait preuve,
en placant au premier rang les auteurs dramatiques contemporains; mais
ou sont les auteurs de premier ordre du siecle dernier et meme du
commencement de ce siecle? Il faut lire les anciens comptes rendus pour
savoir ce qu'on doit penser des places distribuees ainsi par la critique
courante. Je l'ai dit et je le repete, ce qui nous separe, M. Sarcey
et moi, c'est qu'il est enfonce dans l'actualite, dans la pratique
quotidienne de son devoir de lundiste, dans le theatre au jour le jour;
tandis que ce theatre n'est pour moi qu'un sujet d'analyse generale,
et que je ne juge jamais ni un homme ni une oeuvre sans m'inquieter du
passe et de l'avenir.
Veut-il savoir ce que j'entends par un homme de premier ordre? J'entends
un createur. Quiconque ne cree pas, n'arrive pas avec sa formule
nouvelle, son interpretation originale de la nature, peut avoir beaucoup
de qualites; seulement, il ne vivra pas, il n'est en somme qu'un
amuseur. Or, dans ce siecle, Victor Hugo seul a cree au theatre. Je
n'aime point sa formule; je la trouve fausse. Mais elle existe et elle
restera, meme lorsque ses pieces ne se joueront plus. Cherchez autour de
lui, voyez comme tout passe et comme tout s'oublie.
Theodore Barriere vient a peine de mourir, et le voila recule dans un
brouillard. Que les autres s'en aillent, ils fondront aussi rapidement.
Certes, il y a des differences, je ne puis faire ici une etude de chaque
auteur dramatique et indiquer l'argile dans le monument qu'il eleve. Je
me contente de les condamner en bloc, parce que pas un d'entre eux n'a
trouve la formule q
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