) pour
broyer les couleurs, un godet plein d'eau pour humecter et laver les
pinceaux, completaient le trousseau de l'apprenti. Accroupi devant son
modele, palette au poing, il s'exercait a le reproduire en noir, a main
levee et sans appui. Le maitre revoyait son oeuvre et en corrigeait les
defauts a l'encre rouge.
[Illustration: Fig. 156]
Les rares dessins qui nous restent sont traces sur des morceaux de
calcaire, en assez mauvais etat pour la plupart. Le British Museum en a
deux ou trois au trait rouge, qui ont peut-etre servi comme de cartons
au decorateur d'un tombeau thebain de la XXe dynastie. Un fragment
du musee de Boulaq porte des etudes d'oies ou de canards a l'encre
noire. On montre a Turin l'esquisse d'une figure de femme, nue au
calecon pres, et qui se renverse en arriere pour faire la culbute: le
trait est souple, le mouvement gracieux, le modele delicat. L'artiste
n'etait pas gene, comme il l'est chez nous par la rigidite de
l'instrument qu'il maniait. Le pinceau attaquait perpendiculairement la
surface, ecrasait la ligne ou l'attenuait a volonte, la prolongeait,
l'arretait, la detournait en toute liberte. Un outil aussi souple se
pretait merveilleusement a rendre les cotes humoristiques ou risibles de
la vie journaliere. Les Egyptiens, qui avaient l'esprit gai et caustique
par nature, pratiquerent de bonne heure l'art de la caricature. Un
papyrus de Turin raconte, en vignettes d'un dessin sur et libertin, les
exploits amoureux d'un pretre chauve et d'une chanteuse d'Amon. Au
revers, des animaux jouent, avec un serieux comique, les scenes de la
vie humaine. Un ane, un lion, un crocodile, un singe se donnent un
concert de musique instrumentale et vocale. Un lion et une gazelle
jouent aux echecs. Le Pharaon de tous les rats, monte sur un char traine
par des chiens, court a l'assaut d'un fort defendu par des chats. Une
chatte du monde, coiffee d'une fleur, s'est prise de querelle avec une
oie: on en est venu aux coups, et la volatile malheureuse, qui ne se
sent pas de force a lutter, culbute d'effroi. Les chats etaient
d'ailleurs les animaux favoris des caricaturistes egyptiens. Un ostracon
du musee de New-York nous en montre deux, une chatte de race assise sur
Un fauteuil, en grande toilette, et un miserable matou qui lui sert a
manger, d'un air piteux, la queue entre les jambes (Fig.157).
L'enumeration des dessins connus est courte, comme on le voit:
l'abondance de vignettes dont on avait coutume d'orne
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