es avant-gardes; il crut avoir cent cinquante mille
hommes sur les bras, il se figura surtout que Wurmser, qui devait
deboucher par le Palatinat et au-dessus de Mayence, etait sur ses
derrieres, et allait le separer de l'Alsace; il demanda des secours a
Ligneville, qui, tremblant de son cote, n'osa pas deplacer un regiment;
alors il se mit a fuir, se retira tout d'un trait sur Landau, puis sur
Wissembourg, et songea meme a chercher une protection sous le canon de
Strasbourg. Cette inconcevable retraite ouvrit tous les passages aux
Prussiens, qui vinrent se grouper sous Mayence, et l'investirent sur les
deux rives.
Vingt mille hommes s'etaient enfermes dans la place, et si c'etait
beaucoup pour la defense, c'etait beaucoup trop pour l'etat des vivres,
qui ne pouvaient pas suffire a une garnison aussi considerable.
L'incertitude de nos plans militaires avait empeche de prendre aucune
mesure pour l'approvisionnement de la ville. Heureusement elle renfermait
deux representants du peuple, Rewbell et l'heroique Merlin de Thionville,
Les generaux Kleber, Aubert-Dubayet et l'ingenieur Meunier, enfin une
garnison qui avait toutes les vertus guerrieres, la bravoure, la sobriete,
la constance. L'investissement commenca en avril. Le general Kalkreuth
formait le siege avec un corps prussien. Le roi de Prusse et Wurmser
etaient en observation au pied des Vosges, et faisaient face a Custine. La
garnison renouvelait frequemment ses sorties et etendait fort loin sa
defense. Le gouvernement francais, sentant la faute qu'il avait commise en
separant les deux armees de la Moselle et du Rhin, les reunit sous
Custine. Ce general, disposant de soixante a soixante-dix mille hommes,
ayant les Prussiens et les Autrichiens eparpilles devant lui, et au-dela
Mayence, gardee par vingt mille Francais, ne songeait pas a fondre sur le
corps d'observation, a le disperser, et a venir joindre la brave garnison
qui lui tendait la main. Vers le milieu de mai, sentant le danger de son
inaction, il fit une tentative mal combinee, mal secondee et qui degenera
en une deroute complete. Suivant son usage, il se plaignit des
subordonnes, et fut transporte a l'armee du Nord pour rendre
l'organisation et le courage aux troupes retranchees au camp de Cesar.
Ainsi la coalition qui faisait les sieges de Valenciennes et de Mayence,
pouvait, apres deux places prises, avancer sur notre centre, et effectuer
sans obstacle l'invasion.
Du Rhin aux Alpes et aux Pyrenees, un
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