eprouve plus tot le besoin de se rapprocher de toi, ainsi que de ta
fille, dont il aurait fait la sienne. Cela est si vrai que lorsque, pour
des causes qui nous echappent, l'affaiblissement du sentiment paternel
s'est produit en lui, il a repris son testament et l'a detruit, te
faisant ainsi son heritier.
--Que je voudrais te croire!
Se meprenant sur le sens vrai de cette exclamation, Rebenacq crut
qu'elle exprimait seulement le regret de ne pouvoir croire a un retour
d'affection fraternelle:
--Si tu doutes de moi, dit-il, et de mes suppositions, tu ne peux pas
resister aux faits. Le testament a ete detruit, n'est-il pas vrai? Alors
que veux-tu de plus?
X
Detruit, il n'eut voulu rien de plus; mais precisement il ne l'etait
pas, et cet entretien ne le rendait que plus solide, puisqu'au lieu
d'eclaircir les difficultes il les obscurcissait encore en les
compliquant.
Il avait fallu un aveuglement vraiment incroyable, que seul l'interet
personnel expliquait, pour s'imaginer que Gaston ne pouvait penser qu'a
son fils en modifiant ses dispositions, alors que la raison disait qu'il
pouvait tout aussi bien penser a d'autres, celui-ci ou celui-la.
Si, au lieu de vouloir desheriter son fils, il avait voulu desheriter
son frere, quelle valeur pouvait-on attribuer a toutes les suppositions
qui reposaient sur la premiere hypothese? Une seule chose l'appuierait
d'une facon serieuse: ce serait de decouvrir une preuve, ou simplement
un indice que Gaston avait eu des motifs pour changer ses sentiments a
l'egard du capitaine et, par suite, ses dispositions testamentaires
envers lui.
Les seuls temoignages qu'il put consulter etaient les lettres de
Leontine Dufourcq a Gaston, et aussi celles du capitaine trouvees a
l'inventaire. Jusqu'a ce jour il n'avait pas ouvert ces liasses, retenu
par un sentiment de delicatesse envers la memoire de son frere, mais, a
cette heure, ses scrupules devaient ceder devant la necessite.
Apres le dejeuner, il mit les lettres dans ses poches, et, pour etre
certain de ne pas se laisser surprendre par sa femme ou sa fille, il
alla s'asseoir dans un bois ou il serait en surete.
La premiere liasse qu'il ouvrit fut celle de Leontine; elle se composait
d'une quarantaine de lettres, toutes numerotees de la main de Gaston par
ordre de date; les plis, fortement marques, montraient qu'elles avaient
ete souvent lues.
Et, cependant, il ne lui fallut pas longtemps pour constater qu'elles
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