utez-vous aussi que mademoiselle Laurence Harraca, l'ainee des
filles de mon general, est la seule qui ait un chapeau de Lebel et une
robe parisienne, les quatre autres n'ont que des copies executees par
elles a la maison.
--Ca se voit; mais je ne trouve pas que ce soit une raison pour me
deshabiller et m'habiller comme ca: est-ce que je ne les ai pas connus
ces artifices des filles pauvres, et je n'avais pas des modeles de
Lebel.
De table en table ils arriverent a celle ou le baron d'Arjuzanx etait
assis avec des jeunes gens du pays. Comme il s'etait rendu directement a
l'eglise, ils ne s'etaient pas encore vus. Il y eut un moment d'embarras
que d'Arjuzanx parut vouloir abreger en complimentant Anie et en serrant
la main de Sixte.
Ce fut pour tous les deux un soulagement qu'ils se garderent bien de
montrer.
--Saviez-vous que M. d'Arjuzanx fut de retour? demanda Anie.
--Non.
--Ni moi.
Une heure apres, comme on se promenait dans le jardin, Anie, qui venait
de reconduire une de ses parentes, se trouva face a face avec
d'Arjuzanx, qui vint au-devant d'elle.
Il affectait le calme et l'indifference, cependant il etait facile de
lire l'emotion sous son sourire.
Il la salua en lui disant:
--Je vous aimais tant, que votre refus n'a pas tue mon amour; je
n'aimerai jamais que vous.
Avant qu'elle fut revenue de son trouble, il s'etait eloigne.
FIN DE LA DEUXIEME PARTIE
TROISIEME PARTIE
I
A courte distance de la mer, dont les vents brises par les dunes et les
_pignadas_ rafraichissent la temperature; au confluent d'une riviere
capricieuse et d'un beau fleuve, a l'endroit precis ou sa courbe
s'arrondit le plus noblement; entouree de paysages verts et gras comme
ceux de la Normandie, en face d'un plateau boise avec de claires
echappees de vue sur des vallees largement ouvertes, Bayonne serait une
des plus jolies villes du Midi, n'etaient ses fortifications.
C'est pour ne pas se laisser enserrer dans ces fortifications demodees,
que les habitants qui ne sont pas retenus dans la ville pour une raison
imperieuse se sont fait construire des maisons sur la route d'Espagne,
dans la vallee de la Nive, et le long de l'Adour, en facade sur une
belle promenade plantee de grands arbres qu'on appelle les Allees
marines.
C'etait une de ces maisons que Barincq avait choisie pour ses enfants,
une des plus elegantes, sinon des plus riches, en forme de chalet avec
des avant-corps enguirlan
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