Ourteau, pressant son
cocher; quand elle arriva, son pere et sa mere virent a sa physionomie
crispee qu'ils devaient se preparer a un coup cruel.
Tout de suite, elle expliqua ce qui l'amenait, son pere ecoutant
accable, sa mere l'interrompant par des exclamations indignees.
--Est-ce que ton mari s'imagine, s'ecria madame Barincq, que nous allons
encore payer cette somme et nous reduire a la misere pour lui?
Alors elle raconta l'histoire du testament de Gaston: comment Sixte
l'avait trouve; pourquoi il n'avait pas voulu le produire; comment il
l'avait brule.
--C'est donc son argent qu'il a perdu, dit-elle en s'adressant a sa
mere.
Mais celle-ci ne se rendit pas:
--Qui prouve que ce testament etait bon? dit-elle.
Sur cette replique, son mari intervint:
--Il est evident, dit-il, que le testament est celui que Gaston avait
depose entre les mains de Rebenacq, et qu'il etait parfaitement valable.
--Valable ou non, il n'existe plus.
--Pour les autres sans doute, mais pas pour nous.
--Tu paieras!
--Quel moyen de faire autrement?
--Ruinee une fois encore! Que ne suis-je morte avant!
Ce n'etait pas tout de vouloir payer, il fallait savoir ou et comment
trouver l'argent necessaire. Le pere et la fille s'en allerent chez
Rebenacq; mais, quand le notaire eut entendu le recit d'Anie, il leva au
ciel des bras desesperes.
--Je ne vois pas, dit-il, qui consentirait a preter deux cent
soixante-seize mille francs sur la terre d'Ourteau, deja hypothequee
pour cent dix mille.
--Mais elle vaut plus d'un million, dit Anie.
--Ca depend pour qui, et ca depend aussi du moment. Considerez d'autre
part que la propriete est en transformation; que les travaux entrepris
sont a leur debut, qu'ils ne donneront leurs resultats que dans
plusieurs annees; et que, pour bien des gens, ils ont enleve au moins la
moitie de sa valeur a la terre. Ce langage que je vous tiens, c'est
celui des preteurs. Sans doute nous aurons des objections a leur
opposer; mais comment seront-elles accueillies? En tout cas, je n'ai pas
preteur pour pareille somme, et dans ces conditions.
--Ne pouvez-vous pas trouver ce preteur chez un autre notaire? demanda
Anie.
--Nous rencontrerons partout les objections que je viens de vous
presenter; mais enfin, nous pouvons voir a Bayonne.
--Je vous emmene avec mon pere.
Rebenacq hesita, puis il finit par se rendre.
Il etait une heure de l'apres-midi quand ils arriverent a Bayonne, et
quatr
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