i, je n'ai pense qu'a la plus grande marque
d'amour qu'il me fut possible de te donner.
Pour tout dire, pour etre franche jusqu'au bout, j'ajoute que j'ai
pense aussi a notre enfant, et que ce que je faisais pour toi, tu le
lui rendrais.
Que tu doutes de moi, que tu m'accuses, rien ne peut m'etre plus
cruel, et il faut que je t'aime comme je t'aime, que je sois ton
esclave, ta chose, pour le supporter sans revolte; mais, enfin, si
douloureux que cela soit, dans le moment ou tu me frappes de tes
soupcons, je ne perds pas tout courage parce que je sais que je te
ferai revenir a d'autres sentiments, et qu'il n'y a de coupable en
toi que ta nature inquiete et jalouse. Tu es ainsi, et ne peux rien
contre toi; ton esprit toujours en eveil t'emporte et rien ne
t'arrete, ni la raison, ni la vraisemblance, ni la justice, jusqu'a
ce que la voix de ton coeur parle et te montre ton erreur.
Mais si je peux, maintenant que je te connais, accepter ces doutes,
je ne veux pas qu'ils effleurent notre enfant; je ne veux pas que tu
le regardes de cet air sombre et anxieux dont tu regardes la mere en
te posant toutes sortes de questions folles ou absurdes: pour lui je
ferai tous les sacrifices; et par lui tu auras toujours la femme la
plus tendre, la plus soumise, la plus devouee, la plus fidele
jusqu'a mon dernier soupir.
De toi a lui il n'y a pas de questions a te poser, tu n'as qu'un mot
a dire:--Je suis son pere, et lui dois la tendresse, les soins,
l'amour d'un pere.
C'est pour lui que je t'ecris cette longue lettre, bien plus que pour
moi, car, malgre tout, je sens que je n'ai pas a plaider ma cause qui
est si bonne qu'en ce moment meme, j'en suis sure, tu ne penses qu'a
me faire oublier le chagrin que tu m'as cause. Sois tranquille, cela
ne sera pas difficile, et tu n'auras qu'a paraitre pour me trouver
telle que j'ai toujours ete et serai toujours.
Ta bien aimee,
LEONTINE"
Il avait lu les lettres precedentes aussi vivement que le permettait
leur ecriture peu nette; de celle-la au contraire, il pesa chaque mot,
chaque phrase, et quand il arriva a la fin, il la reprit au
commencement.
Mais, si attentif qu'il fut, il n'y trouva rien qu'il ne connut deja, si
ce n'est des indications sur le caractere et la nature de Leontine qui
justifiaient tous les soupcons.
Malgre ses protestations d'am
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