valut de vertes
algarades. Elle avait failli entrainer tante Dine qu'un regard de
l'abbe Heurtevent suffit a maintenir dans la bonne cause. N'invoquait-
elle pas la Providence dont chacun savait qu'elle etait le bras droit,
et qu'elle declarait, on ne savait pourquoi hostile au retour du comte
de Chambord? Afin d'eclipser son adversaire, elle raconta que Jules
Favre, avocat de son Naundorff, avait recu de lui, en temoignage de
gratitude, le cachet des Bourbons et que, n'en portant pas d'autre ce
jour-la, ce jour historique, il avait appose le sceau royal sur le
traite de Paris apres la signature du comte de Bismarck, comme s'il
n'agissait que par delegation de son prince? Cette anecdote ayant
obtenu un succes de curiosite, malgre cette remarque de mon pere: "
Aucun Bourbon n'aurait eu a signer un traite pareil', l'abbe
Heurtevent, ecoeure d'etre interrompu dans ses predictions pour
l'audition de telles balivernes, haussa les epaules en signe
d'incredulite, et du coin ou je brouillais un jeu de cartes, je
l'entendis qui marmonnait:
--Quand l'ane de Balaam parla, le prophete se tut.
Je connaissais, par une gravure de ma Bible, l'aventure de Balaam.
Mais notre abbe eut aussi la sienne et il en fut pour sa courte honte.
Le vieux M. de Hurtin, dont le profil d'oiseau de proie servait a
abuser sur l'opiniatrete de son caractere, ebranle par les recits et
les affirmations de Mlle Tapinois, commenca, lui aussi, de soulever
des objections contre Monseigneur, car on ne manquait point, fut-ce
pour le combattre, de lui donner son titre. Il alla jusqu'a lui
reprocher de ne pas avoir d'enfants.
--On lui en fera un, declara M. Heurtevent dans une subite
illumination.
Cette reponse, lancee avec une grande force, souleva un _tolle_
general. Ces dames manifesterent leur indignation par toutes sortes de
petits cris, et Mlle Tapinois, se voilant la face, protesta contre le
scandale qu'un homme de Dieu ne craignait pas de provoquer dans un
milieu honnete et respectable, et devant des enfants. L'abbe, tout
rouge et tout penaud, et plus accoutume a infliger des semonces qu'a
en recevoir, levait les mains en l'air pendant cette harangue pour
avertir qu'il desirait s'expliquer. On ne le lui permit pas
immediatement, et il dut patienter jusqu'a ce que l'emeute se calmat.
Il avait simplement voulu dire qu'on assurerait la continuite de la
dynastie et que la race royale n'etait pas pres de s'eteindre. Un
successeur legitime tient lieu d'
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