que tous vos
amis, tous les amis du pays s'emploieront ardemment a vous seconder.
Outre toutes les bonnes raisons que vous faites valoir dans votre
programme, il y a necessite urgente a decentraliser Paris, moralement,
intellectuellement et politiquement. La presse parisienne, absorbee par
ses propres agitations, ou fatiguee, de combattre sur une trop vaste
arene, abandonne en quelque sorte la province a ses luttes interieures.
Et, quand la province s'abandonne elle-meme, quand elle n'est pas
representee par un journal independant, elle est livree, pieds et poings
lies, a tous les abus de pouvoir de l'administration salariee. Vous avez
raison de le dire, c'est une honte. C'est renoncer lachement a un des
droits qui constituent la dignite humaine, c'est reculer devant un
devoir social. Les consequences pourraient en etre graves pour le
pouvoir, aussi bien que pour les classes dont le sentiment public
n'a pas d'organe public. Soyez donc cet organe, n'hesitez pas. M. de
Lamartine donne un noble exemple en contribuant de sa plume et de sa
bourse au brillant succes du _Bien public_, de Macon. Ce journal de
localite a deja, dans l'opinion de la France, une plus grande valeur
que la plupart des journaux de la capitale. Je ne doute pas que nous ne
puissions obtenir de ce noble publiciste quelques articles pour notre
_Eclaireur_, et j'ose compter sur le concours de quelques autres noms
illustres et chers au pays. Les hommes de grand coeur et de grande
intelligence sentiront tous que la vie politique et morale doit etre
reveillee et entretenue sur tous les points de la France. Nous avons
dans notre province des elements admirables pour seconder ce genereux
projet. Il ne s'agit que de les reunir.
Litterairement, ce serait une oeuvre interessante a tenter. Paris a
passe son niveau un peu froid, un peu maniere sur toutes les ames, sur
tous les styles. Chaque province a pourtant son tour d'esprit, son
caractere particulier; cet effacement est regrettable. Ne serait-ce pas
une sorte de renovation litteraire que de voir tous ces elements varies
de l'intelligence francaise concourir, sous l'inspiration de l'idee
commune de la pensee nationale, a elever un monument ou chaque partie
aurait sa valeur originale et distincte. L'heroique Breton, le Normand
genereux, le Provencal enthousiaste, et le Lyonnais eminemment
synthetique, n'ont-ils pas chacun leur maniere de sentir, leur forme
d'expression, leur lumiere individuelle pour ainsi dire
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