'en suis certaine, et, dans nos assemblees nationales, on
citera vos paroles dans quelques annees comme vous avez cite celles de
Vatel et de Martens. Vous avez aussi parle de la revolution de 89 avec
une grande verite et un grand courage: continuez donc, et croyez que
l'avenir est a nous, a l'Espagne et a la France, a la France et a
l'Espagne l'une par l'autre, l'une pour l'autre, et toutes deux pour le
monde entier.
Vous me reprochez de hair l'Angleterre _a la francaise._ Non, ce n'est
pas a ce point de vue que je la hais; car je crois a son avenir, je
compte sur son peuple.
J'y vois eclore le chartisme, qui est notre phase, et je ne doute pas
qu'elle ne soit le bras du monde que je reve et que j'attends, comme
nous en serons, Espagnols et Francais, le coeur et la tete.
Mais ce que vous dites de la politique d'interet personnel des cabinets,
appliquez-le a ma haine pour l'Angleterre; je hais son action presente
sur le monde, je la trouve injuste, inique, demoralisatrice, perfide et
brutale; mais ne sais-je point que les victimes de ce systeme affreux
sont la en majorite, comme chez nous les victimes du juste-milieu?
Je ne hais point ce peuple; mais je hais cette societe anglaise; de
meme, je ne haissais point l'Espagne en y passant, mais j'execrais cette
action de Christine et de don Carlos, qui rapetissaient et avilissaient
momentanement le caractere espagnol. Aujourd'hui, l'Espagne a de grandes
destinees devant elle. Y entrera-t-elle d'un seul bond? Aura-t-elle
encore des defaillances et des delires de malade? Qu'importe? rien de ce
qu'elle fait de bon aujourd'hui ne sera perdu, et vous n'avez pas sujet
de desesperer. Poussez a la fraternite, faites des voeux pour que le
regent ait un bras de fer contre les conspirations. Ces insultes du
cabinet francais ne sont pas si funestes. Elles font sentir au duc de la
Victoire que sa mission est une grande lutte, et que le salut est dans
sa fierte comme dans sa perseverance.
En vous ecrivant dernierement, je ne pretendais pas qu'il dut, quant a
present et tout d'un coup, renverser le fantome de la royaute. Je me
suis mal exprimee si vous m'avez ainsi entendue; mais je pretendais, je
pretends toujours que, si la Providence lui conserve la vie, la force et
la popularite, sa mission est la. Il y sera entraine et porte un jour,
s'il reste lui-meme et si l'orage ne balaye pas son oeuvre d'aujourd'hui
avant qu'elle ait pris racine. Esperons! J'espere bien pour la France,
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