qui est en ce moment si malade et si avilie! je douterais de Dieu si je
doutais de notre reveil et de notre guerison.
Bonsoir, cher ami. Travaillez toujours, parlez souvent. Labourez et
ensemencez, _semez et consacrez_, comme dit Faust. De mon amitie, je ne
vous dis rien: vous savez tout la-dessus. Ma Charlotte et vous ne faites
qu'un pour moi, et c'est une grosse part de ma vie, qui est dans votre
unite, comme dirait Leroux.
A vous.
GEORGE SAND.
CCLVII
A MADAME MARLIANI, A PARIS
Nohant, 1er septembre 1846.
Chere amie,
Merci mille fois! mais Solange ne serait point en etat de faire le
voyage de Paris dans ce moment-ci, a moins d'y aller a petites journees,
comme nous faisons nos courses de campagne. D'ailleurs, je n'ai pas plus
de confiance en M. Royer qu'en Papet, et je crois que la medecine ne
sait rien pour ces maladies de langueur. Nous partons aujourd'hui pour
divers points du Berry et de la Creuse, ou nous nous arreterons chaque
fois un jour ou deux. Elle est un peu mieux depuis trois jours, mais
toujours sans appetit et sans sommeil. Une petite fatigue lui est
bonne, une grande fatigue tres mauvaise. Nous avons ete avant-hier a
Chateauroux reconduire Delacroix et recevoir Emmanuel qui a fait un peu
la grimace a l'idee de se remballer tout de suite, dans d'assez mauvais
chemins et pour d'assez mauvais gites. Mais il aime encore mieux cela
que de rester tout seul ici.
Je vous ecris a la hate. Oui, vous devriez aller passer cette quinzaine
encore en Normandie, si le voyage est court et pas fatigant; car les
beaux jours ne dureront peut-etre pas cet automne. Nous avons ici de
grandes chaleurs et de grandes pluies qui semblent nous annoncer un
hiver precoce. Moi, je n'ose pas vous repondre de l'emploi de mon mois
de septembre. Je suis tourmentee et je suis decidee a tout essayer pour
que ce triste etat de Solange ne s'installe pas chez elle pour tout
l'hiver. Vous etes mille fois bonne de m'offrir un gite. Nous avons
toujours notre appartement du square Saint-Lazare et rien ne nous
empecherait d'y aller. Mais Papet ne me conseille pas du tout les
longues etapes pour Solange; au contraire, elles irritent beaucoup notre
malade. Nous la promenons une lieue a cheval, une lieue en voiture; puis
on se repose, on reprend, et toujours ainsi. Je tache de l'egayer; mais
je ne suis pas gaie au fond. Elle est bien sensible a l'interet que vous
lui temoignez et me charge d
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