autre
application que la doctrine de Fourier. C'est parce qu'elle n'applique
nullement nos principes, quoi que vous en disiez, que nous ne l'aimons
pas et que nous ne la voulons pas. Vous conciliez ces principes et les
notres avec beaucoup d'art et de talent. Mais, a votre insu, c'est une
conciliation specieuse; car la doctrine de l'industrialisme attrayant,
comme on l'entend dans le fourierisme; n'est pas depourvue de
_principes_. Elle en a, et nous les trouvons antireligieux, et nous les
sentons non pas seulement inconciliables, mais opposes diametralement
aux notres.
Je n'entends pas, puisque vous vous en defendez si bien, vous ranger
dans certaine serie determinee: peut-etre etes-vous injuste, vous, de
nous classer parmi les reveurs impuissants.
Mais, puisque vous ne nous accordez que la possession d'un tiers de
verite, voyez quel chemin il faudrait faire a vous ou a moi pour
reconnaitre que l'un de nous resume en lui la trinite? Vous croyez
la tenir cette triplicite d'aspect de la verite. Et, moi, je crois
l'entrevoir. Mais nous ne la placons pas dans les memes choses; et
je crois qu'au debut, lorsque le bon et sincere M. de Pompery nous
presentait l'un a l'autre comme tout semblables l'un a l'autre, nous
n'avions pas apercu les buissons et les fosses que nous avions a
franchir pour lui donner raison.
N'importe, je ne refuse pas d'essayer; mais n'essayons pas de sauter
ces barrieres avant de savoir si nous avons ensuite un chemin a suivre
ensemble; car, si cela n'est pas, mieux vaut nous examiner lentement
pour nous retrouver un jour dans un chemin mieux cherche et mieux trace.
Peut-etre alors aurez-vous mieux compris Leroux; peut-etre aussi
aurai-je mieux etudie Fourier, et alors nous nous entendrons sans faire
violence a nos sympathies et a cette sorte d'instinct que l'artiste
comme le politique doit beaucoup respecter en lui-meme. Si, comme
vous le croyez, tout concourt au but, si nos forces de repulsion,
fussent-elles inintelligentes et injustes jusqu'a un certain point, sont
les foyers memes de notre courage et le secret de notre puissance, quoi
qu'il en resulte, croyez bien que je rends justice a votre intelligence
et a votre loyaute, et que je ne regrette point de vous avoir cause
quelques soucis d'esprit.
Tout ce qui nous fait examiner, rever et raisonner notre vie morale est
une etude salutaire, et j'espere que vous ne m'en voudrez pas de vous
avoir traite en homme de conscience et de reflexion.
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