point de guerre systematique au corps dont vous faites partie. Mais
tout ce qui tendra a la reedification du culte catholique trouvera en
moi un adversaire, fort paisible a la verite (a cause du peu de vigueur
de mon caractere et du peu de poids de mon opinion), mais inebranlable
dans sa conduite personnelle. Depuis que l'esprit de liberte a ete
etouffe dans l'Eglise, depuis qu'il n'y a plus, dans la doctrine
catholique, ni discussions, ni conciles, ni progres, ni lumieres, je
regarde la doctrine catholique comme une lettre morte, qui s'est placee
comme un frein politique au-dessous des trones et au-dessus des peuples.
C'est a mes yeux un voile mensonger sur la parole du Christ, une fausse
interpretation des sublimes Evangiles, et un obstacle insurmontable a
la sainte egalite que Dieu promet, que Dieu accordera aux hommes sur la
terre comme au ciel.
Je n'en dirai pas davantage; je n'ai pas l'orgueil de vouloir
engager une controverse avec vous, et, par cela meme, je crains peu
d'embarrasser et de troubler votre foi. Je vous dois compte du motif de
mon refus, et je desire que vous ne l'imputiez a aucun autre sentiment
que ma conviction. Le jour ou vous precherez purement et simplement
l'Evangile de saint Jean et la doctrine de saint Jean Chrysostome, sans
faux commentaire et sans concession aux puissances de ce monde, j'irai a
vos sermons, monsieur le cure, et je mettrai mon offrande dans le tronc
de votre eglise; mais je ne le desire pas pour vous: ce jour-la, vous
serez interdit par votre eveque et les portes de votre temple seront
fermees.
Agreez, monsieur le cure, toutes mes excuses pour ma franchise, que vous
avez provoquee, et l'expression particuliere de ma haute consideration.
GEORGE SAND.
CCXLV
A M. LOUIS BLANC, A PARIS
Nohant, novembre 1844.
Mon cher monsieur Blanc,
Mes vives et profondes sympathies pour l'oeuvre de la _Reforme_ et pour
les personnes qui lui ont imprime une direction a la fois sociale et
politique, ne datent pas d'aujourd'hui. Peut-etre que l'_art_ m'a
manque pour l'exprimer et le _loisir_ pour le prouver. Mais ce n'est ni
l'intention ni le devouement.
Il y a deux parties dans la lettre si flatteuse que vous avez bien voulu
m'ecrire. Il y a un appel a ma collaboration litteraire: par ma volonte,
elle est assuree a la _Reforme_ autant que les necessites reelles et
inevitables de ma vie me permettront de lui consacrer ses heures. Il y
a a
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