agne ses
amis, il devait les suivre jusqu'au bout, dussent-ils y laisser leur
peau, tous. Ils allaient donc, avec prudence, mais parfaitement
resolus...
Du cabinet, ils passerent dans le couloir.
Ce couloir, assez vaste, comme nous avons pu le voir en suivant Fausta,
etait, comme le vestibule et le cabinet, eclaire par des lampes
suspendues au plafond de distance en distance.
Et toujours la solitude. Toujours le silence. C'etait a se demander si
cette opulente demeure etait habitee.
Le Torero, qui marchait en tete, ouvrit resolument la premiere porte
qu'il rencontra.
--Giralda! cria-t-il dans un transport de joie.
Et il se rua a l'interieur de la piece, suivi de Cervantes et du nain.
La Giralda, nous l'avons dit, sous l'empire d'un narcotique, dormait
profondement.
Don Cesar la prit dans ses bras, inquiet deja de voir qu'elle ne
repondait pas a son appel.
--Giralda! balbutia-t-il angoisse, reveille-toi!
En disant ces mots, il lachait le buste, s'agenouillait devant la jeune
fille et lui saisissait les deux mains. Le buste n'etant plus soutenu,
s'abandonna mollement sur les coussins.
--Morte! sanglota l'amoureux livide.
--Non pas, corps du Christ! s'ecria vivement Cervantes. Elle n'est
qu'endormie. Voyez comme le sein se souleve regulierement.
--C'est vrai! s'ecria don Cesar, passant du desespoir le plus affreux a
la joie la plus vive. Elle vit!
A ce moment, la Giralda soupira et commenca a s'agiter. Presque
aussitot, elle ouvrit les yeux. Elle ne parut nullement etonnee de voir
le Torero a ses pieds et elle lui sourit.
--Mon cher seigneur! dit-elle tres doucement.
Et sa voix ressemblait au gazouillis d'un oiseau.
Ils se prirent les mains, et, oubliant le reste de la terre, ils se
parlerent des yeux en se souriant, extasies. Et c'etait un tableau d'une
fraicheur exquise.
Avec son eclatant costume: melange de soie, de velours, de satin, de
tresses, de houppettes multicolores, avec son opulente chevelure, aux
meches indisciplinees retombant en desordre sur le front, la raie
cavalierement jetee sur le cote, la tache pourpre d'une fleur de
grenadier au-dessus de l'oreille, avec ses grands yeux ingenus, son
teint eblouissant, son sourire gracieux decouvrant l'ecrin perle de
sa bouche; avec son air a la fois candide et mutin, et dans sa pose
chastement abandonnee, la Giralda, surtout, etait adorable.
Il est probable qu'ils seraient restes indefiniment a se parler le
langage muet des a
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