sistance. Chacun avait regagne sa
place, heureux et fier de la faveur que le hasard lui avait octroye. Le
duc de Castrana declara:
--Seigneurs, notre bien-aimee souveraine consent a s'expliquer devant
vous.
Ayant dit, il s'inclina devant Fausta et reprit sa place derriere son
fauteuil. A cette annonce du duc, un silence religieux s'etablit comme
par enchantement. Un instant, Fausta les tint sous le charme de son
regard, et, de sa voix singulierement prenante, elle dit:
--Vous etes ici une elite. Catholiques ou heretiques--comme on
dit couramment--vous etes tous des croyants sinceres et, partant,
respectables. Mais vous etes aussi animes d'un esprit de large
tolerance. Sous le sombre despotisme de cette institution justement
anathematisee par des papes qui payerent ce courage de leur vie,
l'Inquisition, cet esprit a fait de vous des proscrits, dechus de leurs
titres, ruines, traques, avec la menace du bucher suspendue sur vos
tetes, jusqu'au jour ou la main du bourreau s'appesantira sur vous pour
la realiser, cette menace. Vous vous etes souvenus que l'union fait la
force, et, lasses de l'effroyable tyrannie qui pese sur les corps et
sur les consciences, vous vous etes cherches, concertes et finalement
associes. Vous avez resolu de vous soustraire au joug de fer. Ayant fait
le sacrifice de votre vie, vous avez reuni vos efforts et vous vous etes
mis bravement a l'oeuvre. Aujourd'hui, tous, ici, vous etes des chefs
occultes. Chacun de vous represente une force de plusieurs centaines de
combattants qui attendent un ordre.
--Vous avez eu connaissance de la naissance mysterieuse d'un fils de don
Carlos, par consequent d'un petit-fils du despote sanguinaire sous la
rude poigne duquel l'Espagne agonise. Vous avez pense a faire de ce fils
de l'infant votre chef supreme, esperant que Philippe accepterait le
demembrement de ses Etats en faveur de son petits-fils. C'est bien cela,
n'est-ce pas?
Les auditeurs repondirent affirmativement.
--Eh bien, reprit Fausta sur un ton tranchant, vous vous etes trompes,
gravement trompes, insista-t-elle.
Des protestations eclaterent un peu partout.
--Pourquoi? crierent plusieurs au milieu du tumulte.
Impassible, Fausta attendit, n'essayant pas de dominer le bruit. Lorsque
le brouhaha se fut apaise:
--Jamais, reprit-elle froidement, l'orgueil de Philippe ne consentira
un tel demembrement. Il faudrait bien peu connaitre le caractere
intraitable du roi pour supposer que, vai
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