jamber ces memes
obstacles, ce qui ralentissait considerablement leur elan.
Pardaillan les regardait venir a lui avec ce sourire railleur qu'il
avait dans ces moments.
Il avait dedaigne de tirer sa dague, seule arme qu'il eut a sa
disposition. Seulement, il s'etait place derriere la banquette, sur
laquelle il etait assis l'instant d'avant. Cette banquette etait la
derniere de la rangee. Pardaillan avait place son genou gauche sur cette
banquette, et, ainsi place, les bras croises, l'oeil aux aguets et
petillant de malice, il attendait qu'ils fussent a sa portee.
Fausta, qui le surveillait de sa place, et qui, devant cette froide
intrepidite, sentait le doute l'envahir de plus en plus, se disait:
"Il va les battre tous! c'est certain! c'est fatal!"
Cependant Pardaillan avait reconnu les ordinaires, et, de sa voix
railleuse:
--Bonsoir, messieurs!
--Bonsoir, monsieur de Pardaillan, repondirent poliment les trois.
--C'est la deuxieme fois aujourd'hui que vous me chargez, messieurs. Je
vois que vous gagnez honnetement l'argent que vous donne Mme Fausta.
Seulement je suis confus de vous donner tant de mal.
--J'espere que nous serons plus heureux cette fois-ci, dit Chalabre.
--C'est possible! fit paisiblement Pardaillan, d'autant que, vous le
voyez, je suis sans arme.
--C'est vrai! dit Montsery, en s'arretant. M. de Pardaillan est desarme!
--Nous ne pouvons pourtant pas le charger, s'il ne peut se defendre, dit
tout bas Montsery.
--D'autant qu'ils sont assez nombreux pour mener a bien la besogne,
ajouta Sainte-Maline en designant du coin de l'oeil les hommes de
Centurion.
--Puisque vous n'avez pas d'arme, dit-il tout haut a Pardaillan, nous
nous abstenons, monsieur. Que diable! nous ne sommes pas des assassins!
Pardaillan s'inclina gracieusement, et:
--En ce cas, messieurs, ecartez-vous et regardez...
A ce moment, sept ou huit des plus vifs parmi les assaillants n'avaient
plus que deux rangees de banquettes a franchir pour etre sur lui.
Posement, avec des gestes mesures, Pardaillan se courba et saisit a
pleins bras la banquette sur laquelle il appuyait son genou.
C'etait une banquette longue de plus d'une toise, en chene massif et
dont le poids devait etre enorme.
Pardaillan la souleva sans effort apparent et, quand les premiers
assaillants se trouverent a sa portee, il balaya l'espace de sa
banquette tendue a bout de bras, en un geste large, foudroyant de force
et de rapidite.
Un
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