?
--Vous etes trop grand, tiens!
--Diable! Alors? Tu connais un autre chemin par ou je pourrai passer?
Oui!... Tout va bien.
--Oui, mais, par ce chemin, nous pourrons rencontrer du monde.
--Ces souterrains sont donc habites?
--Non, mais quelquefois il y a des hommes qui se reunissent la-dedans...
Aujourd'hui, justement, il y a une reunion.
--Qu'est-ce que ces hommes, et que font-ils? demanda curieusement le
chevalier.
--Je ne sais pas, seigneur.
Ceci fut dit d'un ton sec. Pardaillan vit qu'il savait, mais qu'il n'en
dirait pas plus long. Il etait inutile d'insister. Il eut un leger
sourire et poursuivit:
--Sais-tu que j'etais condamne a mort? Oui. Je devais mourir de faim et
de soif.
Le nain chancela. Une teinte livide se repandit sur son visage.
--Mourir de faim et de soif, begaya-t-il en frissonnant. C'est horrible!
--En effet. Tu n'aurais pas imagine cela, toi? C'est une idee d'une
princesse de ma connaissance... que tu ne connais pas, toi, heureusement
pour toi...
En disant ces mots sur un ton tres naturel, Pardaillan souriait
doucement. Pourtant, le nain rougit. Il lui semblait que l'etranger
voulait lui faire sentir de quelle abominable action il s'etait fait le
complice. Il ne se reconnaissait plus, le petit homme. Voici maintenant
que des choses qu'il n'avait jamais soupconnees jusque-la se levaient
dans son esprit eperdu, Et il considerait avec un respect mele d'une
terreur superstitieuse cet etranger qui, sans en avoir l'air, en
souriant d'un air railleur, disait tres simplement des choses tres
simples qui, neanmoins, lui mettaient dans la tete des idees confuses,
qu'il ne comprenait pas tres bien et qui heurtaient ses idees
accoutumees. Pourquoi, puisqu'il le haissait, pourquoi la pensee de
l'affreux supplice, cette pensee qui eut du le rendre joyeux, le
soulevait-elle d'horreur et de degout? Pourquoi? Qu'y avait-il donc en
lui?
Entre deux ames egalement belles et pures, il y a des affinites secretes
qui font que, sans se connaitre, elles se devinent et s'apprecient a
leur juste valeur. Pardaillan ne connaissait pas le nain, il avait de
bonnes raisons de croire qu'il lui devait d'avoir ete place dans la
situation critique ou il se trouvait. Pourquoi n'eprouvait-il aucune
colere contre lui? Pourquoi n'eprouva-t-il que de la pitie? Pourquoi
concut-il instantanement le projet d'arracher cette petite creature
inconnue a l'affreux desespoir ou il la voyait sombrer? Pourquoi?
Le
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