fit achever ceux qui etaient
en construction, et parvint ainsi a armer six vaisseaux de guerre, six
fregates et plusieurs corvettes, qu'il reunit a l'escadre que Brueys
avait amenee de Toulon. Il remplaca le million que la tresorerie avait
arrete, donna a Brueys des fonds pour enroler d'excellens matelots en
Albanie et sur les cotes de la Grece, et lui crea ainsi une marine
capable d'imposer a toute la Mediterranee. Il en fixa le principal
etablissement a Corfou, par des raisons excellentes, et qui furent
approuvees du gouvernement. De Corfou, cette escadre pouvait se porter
dans l'Adriatique, et se concerter avec l'armee d'Italie en cas de
nouvelles hostilites; elle pouvait aller a Malte, elle imposait a la
cour de Naples, et il lui etait facile, si on la desirait dans l'Ocean,
pour la faire concourir a quelque projet, de voler vers le detroit plus
promptement que si elle eut ete a Toulon. Enfin a Corfou, l'escadre
apprenait a devenir manoeuvriere, et se formait mieux qu'a Toulon, ou
elle etait ordinairement immobile. "Vous n'aurez jamais de marins,
ecrivait Bonaparte, en les laissant dans vos ports."
Telle etait la maniere dont Bonaparte occupait son temps pendant les
lenteurs calculees que lui faisait essuyer l'Autriche. Il songeait aussi
a sa position militaire a l'egard de cette puissance. Elle avait fait
des preparatifs immenses, depuis la signature des preliminaires de
Leoben. Elle avait transporte la plus grande partie de ses forces dans
la Carinthie, pour proteger Vienne et se mettre a couvert contre la
fougue de Bonaparte. Elle avait fait lever la Hongrie en masse. Dix-huit
mille cavaliers hongrois s'exercaient depuis trois mois sur les bords du
Danube. Elle avait donc les moyens d'appuyer les negociations d'Udine.
Bonaparte n'avait guere plus de soixante-dix mille hommes de troupes,
dont une tres petite partie en cavalerie. Il demandait des renforts
au directoire pour faire face a l'ennemi, et il pressait surtout la
ratification du traite d'alliance avec le Piemont pour obtenir dix
mille de ces soldats piemontais dont il faisait si grand cas. Mais
le directoire ne voulait pas lui envoyer de renforts, parce que le
deplacement des troupes aurait amene de nombreuses desertions; il aimait
mieux, en accelerant la marche de l'armee d'Allemagne, degager l'armee
d'Italie, que la renforcer; il hesitait encore a signer une alliance
avec le Piemont, parce qu'il ne voulait pas garantir un trone dont il
esperait et souha
|