ayait de sa servilite
par aucune espece de confiance.
On consultait souvent Bonaparte dans certaines questions. On lui
envoyait un ministre pour l'appeler au directoire; il s'y rendait,
prenait place a cote des directeurs, et donnait son avis avec
cette superiorite de tact qui le distinguait dans les matieres
d'administration et de gouvernement comme dans celles de guerre. Il
affectait en politique une direction d'idees qui tenait a la position
qu'il avait prise. Le lendemain du 18 fructidor, on l'a vu, une fois
l'impulsion donnee, et la chute de la faction royaliste assuree,
s'arreter tout-a-coup, et ne vouloir preter au gouvernement que l'appui
exactement necessaire pour empecher le retour de la monarchie. Ce point
obtenu, il ne voulait pas paraitre s'attacher au directoire; il voulait
rester en dehors, en vue a tous les partis, sans etre lie ni brouille
avec aucun. L'attitude d'un censeur etait la position qui convenait a
son ambition. Ce role est facile a l'egard d'un gouvernement tiraille en
sens contraire par les factions, et toujours expose a faillir; il est
avantageux, parce qu'il rattache tous les mecontens, c'est-a-dire tous
les partis, qui sont bientot universellement degoutes du gouvernement
qui veut les reprimer, sans avoir assez de force pour les ecraser. Les
proclamations de Bonaparte aux Cisalpins et aux Genois sur les lois
qu'on avait voulu rendre contre les nobles, avaient suffi pour indiquer
sa direction d'esprit actuelle. On voyait, et ses discours le montraient
assez, qu'il blamait la conduite que le gouvernement avait tenue a la
suite du 18 fructidor. Les patriotes avaient du naturellement reprendre
un peu le dessus depuis cet evenement. Le directoire etait, non pas
domine, mais legerement pousse par eux. On le voyait a ses choix, a ses
mesures, a son esprit. Bonaparte, tout en gardant cependant une grande
reserve, laissait voir du blame pour la direction que suivait le
gouvernement; il paraissait le regarder comme faible, incapable, se
laissant battre par une faction apres avoir ete battu par une autre. Il
etait visible, en un mot, qu'il ne voulait pas etre de son avis. Il se
conduisit meme de maniere a prouver qu'en voulant s'opposer au retour
de la royaute, il ne voulait cependant pas accepter la solidarite de la
revolution et de ses actes. L'anniversaire du 21 janvier approchait,
il fallut negocier pour l'engager a paraitre a la fete qu'on allait
celebrer pour la cinquieme fois. Il etait arriv
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