est bien simple: j'aime cet ange dont vous avez le
bonheur d'etre le pere. Il faut donc que vous sachiez qui je suis. Je
m'appelle Charles, duc d'Angouleme. Ma mere s'appelle Mme Marie Touchet,
et mon pere s'appelait Charles IX...
--Le fils du roi! murmura Violetta ravie.
Au fond de cette rue paisible, les clameurs mortelles n'arrivaient pas.
Dans cette salle aux beaux meubles luisants, aux tapisseries anciennes,
regnait un calme infini. Charles d'Angouleme, cependant, reprenait:
--Vous savez maintenant qui je suis... je serais bien heureux, en cette
minute la plus heureuse de ma vie, de savoir qui est le pere de celle
que j'aime...
Claude, qui contemplait Violetta, releva lentement la tete. Les larmes
de bonheur qui coulaient sur ses joues se figerent au bord de ses yeux
hagards.
Qui je suis? fit-il d'une voix etranglee.
En meme temps, d'un geste instinctif, il retira sa main que Charles
avait prise. Cette main... cette main homicide... cette main rouge de
sang...!
Violetta palit affreusement. Elle avait compris, elle!...
--Pere! oh! mon bon pere Claude! balbutia-t-elle. Et cette parole etait
adorable! cette parole ou elle reconnaissait le bourreau pour son pere
en une pareille seconde!...
--Non, non! repeta Claude. Vous n'avez pas eu tort de me demander qui je
suis. Il faut que vous sachiez ce que je ne suis pas. Monseigneur duc,
je ne suis pas le pere de cette enfant!...
--Pere! pere! cria Violetta d'une voix dechirante, vous m'avez deja dit
cela! Eh bien moi, quoi qu'il arrive, je declare que vous etes mon pere,
et que je n'en ai jamais eu d'autre que vous!...
Tandis que Charles demeurait stupefait, bouleverse, Claude souleva
Violetta dans ses bras, la serra un instant, avec un rauque sanglot, sur
sa vaste poitrine, et l'emporta dans la piece voisine ou il la deposa
dans un fauteuil.
--Ne bouge pas, fit-il, ne crains rien... ton vieux papa Claude
arrangera tout. Tu l'epouseras, le fils du roi!... bientot tu seras
madame la duchesse d'Angouleme...
Alors il revint dans la salle ou il avait laisse Charles, et se mit a
marcher de long en large, pensif.
--Monsieur, fit-il en s'arretant tout a coup, comme je vous le disais,
je ne suis pas le pere de Violetta. Je l'ai seulement elevee. Il
importe donc assez peu que vous sachiez ce que j'ai ete. Je vous dirai
simplement que mon nom est maitre Claude, et que je suis bourgeois de
Paris. Ce qui importe, reprit-il en faisant un effort, c'est que
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