etc.--_Thes. nov. anecd._, t. V, p. 1147.--S. Bern., _Op._, ep.
CCCXXXVII.--_Ab. Op._; Not., p. 1101.)]
Quand les hommes superieurs se rencontrent, ils essaient ou feignent de
s'entendre, du moins tant que la guerre n'est pas declaree. Mais une
fois separes, chacun, rentre dans son camp, y retrouve ses amis, ses
confidents, ses flatteurs, et se rechauffe au foyer de l'esprit de
parti. Ce qui inquietait Bernard, c'etait moins encore la nature que le
succes des doctrines d'Abelard. Il voyait au loin s'etendre l'esprit de
controverse sur les matieres les plus hautes et les plus sacrees. Dans
les derniers temps, des heresies graves, notamment sur la Trinite,
s'etaient produites en divers lieux[240]. Abelard, apres en avoir
beaucoup refute par ses arguments, en avait suscite d'autres par sa
methode. Il autorisait les erreurs meme qu'il n'enseignait pas. Partout
a sa voix se dressait, moins prudent et moins reserve que lui, l'eternel
ennemi de l'autorite, l'examen. Son exemple avait comme dechaine dans la
lice la raison individuelle.
[Note 240: C'etait surtout celles de Henry, de Tanquelm ou Tankolin,
de Pierre de Bruis, peut etre aussi des deux freres bretons, Bernard et
Thierry dont parle Othon de Frisingen, et dont Gautier de Mortagne
a refute le second. On suppose que ce sont les deux freres que veut
designer Abelard dans le tableau qu'il a par deux fois trace des
heresies contemporaines. (Cf. _Introd. ad Theol._, l. II, p.
1066.--_Theolog. Christ_., l. IV, p. 1314-1316, et ci-apres, l. III. c.
II.--_Rec. des Histor._, t. XIV, praef., p. IXX.--_De Gest. Frid._, l.
I, c. XLVII.--_Spicileg._, t. III.--_Hist. litt_., t. XIII, p. 378).]
Hors de sa presence, l'abbe de Clairvaux ne se contraignit point pour
maudire cette reformation anticipee; il ne s'abstint pas d'en rapporter
l'existence au plus renomme des novateurs; sans peut-etre attaquer
directement sa personne, il accusait ses principes et son exemple. Il
arrachait ses livres des mains de ses disciples, et prechait contre
la contagion de son ecole. Autour du nouvel apotre s'elevait contre
l'autorite doctrinale d'Abelard une clameur de reprobation et
d'anatheme. Nous en pouvons juger par le langage des ecrivains partisans
de saint Bernard. Abelard _dogmatisait perfidement_, disent-ils tous. Il
fut _negromant et familier du demon_, a ecrit Gerard d'Auvergne[241].
[Note 241: "De fide dogmatizans ferfide.... Nigromanticus et daemoni
familiaris." (_Thes. anc_. t. V, p
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