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ent malades ou estropies, car les premiers ne voyaient que ceux qui tombaient autour d'eux, tandis que les derniers passaient sur la longue trainee des morts et des mourants que tous les corps laissaient apres eux. Ils avaient encore le desavantage d'etre talonnes par l'ennemi. Faloppa, ce soldat de la compagnie que l'on avait laisse avec moi, ne paraissait pas etre dans une position meilleure que la mienne; nous marchions ensemble depuis un quart d'heure, lorsqu'il se tourna de mon cote en me disant: "Eh bien, mon sergent! si nous avions ici les petits pots de graisse que vous m'avez fait jeter lorsque nous etions en Espagne, vous seriez bien content et nous pourrions faire une bonne soupe!" Ce n'etait pas la premiere fois qu'il disait ca, et en voici la raison; c'est un episode assez drole: Un jour que nous venions de faire une longue course dans les montagnes des Asturies, nous vinmes loger a Saint-Hiliaume, petite ville dans la Castille, sur le bord de la mer. Je fus loge, avec ma subdivision, dans une grande maison qui formait l'aile droite de la Maison de Ville[64]. Cette partie, tres vaste, etait habitee par un vieux garcon absolument seul. En arrivant chez lui, nous lui demandames si, avec de l'argent, nous ne pourrions pas nous procurer du beurre ou de la graisse, afin de pouvoir faire la soupe et accommoder des haricots. L'individu nous repondit que, pour de l'or, on n'en trouverait pas dans toute la ville. Un instant apres, nous fumes a l'appel. Je laissai Faloppa faire la cuisine et je chargeai un autre homme de chercher, dans la ville, du beurre ou de la graisse, mais on n'en trouva pas. Lorsque nous rentrames, la premiere chose que Faloppa nous dit, en rentrant, fut que le bourgeois etait un coquin: "Comment cela? lui dis-je.--Comment cela? nous repondit-il, voyez!..." [Note 64: Cette habitation etait un chateau gothique comme il s'en trouve beaucoup en Espagne. (_Note de l'auteur._)] Il me montra trois petits pots en gres contenant de la belle graisse que nous reconnumes pour de la graisse d'oie. Alors chacun se recria: "Voyez-vous le gueux d'Espagnol! Voyez-vous le coquin!" Notre cuisinier avait fait une bonne soupe et, dans le dessus de la marmite, il avait accommode des haricots. Nous nous mimes a manger sous une grande cheminee qui ressemblait a une porte cochere, lorsque l'Espagnol rentra, enveloppe dans son manteau brun et, nous voyant manger, nous souhaita bon appetit. Je lui demandai pour
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