as a notre aise, car, quoique deguises, nous
avions peur de tomber entre les griffes des Cosaques dont le
bourgmestre nous avait parle avant notre depart.
"Apres dix minutes de marche au galop, nous arrivames dans un petit
village ou les habitants, en nous voyant, se mirent a crier: "Hourra!
hourra! nos amis les Cosaques, hourra!" Ils nous dirent qu'au grand
village, a un quart de lieue, nos camarades avaient couche et qu'ils
en etaient partis afin de couper la retraite aux Francais, avant
qu'ils pussent atteindre le bois qui traversait la route. Ils
voulurent nous faire descendre de cheval pour nous faire rafraichir,
mais, comme nous n'etions pas tranquilles, nous nous contentames de
boire quelques verres de _schnapps_ sans descendre. Ensuite mon frere
cria "hourra!" et nous partimes, emportant la bouteille de _schnapps_
et accompagnes des hourras de toute la population.
"Il pouvait etre trois heures lorsque nous apercumes le bois devant
nous, et nous n'en etions plus loin lorsque nous entendimes la
fusillade et vimes, pres d'une maison situee sur le bord de la route,
un combat entre les Francais et la cavalerie russe. Ainsi les paysans
ne nous avaient pas menti, c'etaient bien les Cosaques qui voulaient
couper la retraite a la colonne des traineurs, avant qu'elle put
atteindre le bois.
"Voyant cela, nous faisons prendre le galop a nos chevaux et, sans
penser que nous ressemblons a des Cosaques, nous nous postons sur la
route afin de tacher de gagner l'entree du bois ou tous les traineurs
se precipitent. Ils nous prennent pour des Cosaques et accelerent leur
fuite. Les Cosaques, a leur tour, nous prenant pour des leurs, pensent
que nous poursuivons les Francais, viennent a une douzaine pour nous
soutenir et entrent avec nous dans le bois. J'avais un Cosaque a ma
droite, et mon frere a ma gauche; tout le reste des Cosaques derriere
moi, dont on aurait dit que j'etais le chef.
"La route etait a peine assez large pour que trois cavaliers pussent
marcher de front; apres avoir trotte une cinquantaine de pas, nous
apercevons plusieurs officiers de chez nous qui nous barrent le
passage en croisant la baionnette et en criant a ceux qui fuyaient:
"N'ayez pas peur de cette canaille, laissez-les avancer!" Je profite
de l'occasion et, ralentissant le pas de mon cheval, j'applique sur la
figure du Cosaque qui etait a ma droite, le plus fameux coup de
sabre[71]. Il fait encore un pas et s'arrete en tournant la tete de
mon c
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