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oldat du train.--Certainement, lui dis-je, les Russes, les Cosaques seront ici peut-etre dans quelques heures!" Ces pauvres soldats pensaient qu'il n'y avait que le froid et la misere qui nous accompagnaient. Entres dans l'ecurie, nous trouvames le pauvre diable de Piemontais couche de tout son long derriere la porte. On le mit sur la chaise et, de cette maniere, il fut transporte au nouveau logement. Lorsqu'il fut couche pres du poele, sur de la bonne paille, il se mit a prononcer quelques mots sans suite. Alors je m'approchai pour ecouter; il n'etait plus reconnaissable, car il avait toute la figure ensanglantee, mais c'etait le sang de ses mains, qu'il avait mordues ou voulu manger; sa bouche etait aussi remplie de paille et de terre. Les deux femmes en eurent pitie, lui laverent la figure avec de l'eau et du vinaigre, et les soldats allemands, honteux de n'avoir rien fait comme les autres, le deshabillerent. L'on trouva dans son sac une chemise qu'on lui mit en echange de celle qu'il avait sur lui, et qui tombait en lambeaux; ensuite on lui presenta a boire: il ne pouvait plus avaler et, par moments, serrait tellement les dents, qu'on ne pouvait lui ouvrir la bouche. Ensuite, avec ses mains, il ramassait la paille, qu'il semblait vouloir mettre sur lui. Une des femmes me dit que c'etait signe de mort. Cela me fit de la peine, parce que nous touchions au terme de nos souffrances. J'avais fait tout ce qu'il avait ete possible de faire pour le sauver, comme il aurait fait pour moi, car il y avait cinq ans qu'il etait dans la compagnie, et se serait fait tuer pour moi: dans plus d'une occasion il me le prouva, surtout en Espagne. La douce chaleur qu'il faisait dans cette chambre me fit eprouver un bien-etre auquel j'etais bien loin de m'attendre; je ne me sentais plus de douleurs, de sorte que je dormis pendant deux ou trois heures, comme il ne m'etait pas arrive depuis mon depart de Moscou. Je fus eveille par un des soldats du train qui me dit: "Mon sergent, je pense que tout le monde part, car l'on entend beaucoup de bruit: tant qu'a nous, nous allons nous reunir sur la place, d'apres l'ordre que nous en avons recu hier. Pour votre soldat, ajouta-t-il, il ne faut plus y penser, c'est un homme perdu!" Je me levai pour le voir: en approchant, je trouvai, a ses cotes, les deux femmes. La plus jeune me remit une bourse en cuir qui contenait de l'argent, en me disant qu'elle etait tombee d'une des poches de sa cap
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