une maison qu'ils avaient decouverte, pas
bien loin de notre ecurie, et ou il y avait de la paille et un poele
bien chaud; que la maison etait occupee par un homme, deux femmes et
quatre soldats de la garnison de Kowno, dont deux soldats du train et
deux autres de la Confederation du Rhin.
Aussitot, je me disposai a les suivre, mais je ne pouvais pas
abandonner Faloppa. En regardant a la place ou je l'avais laisse, ma
surprise fut grande de ne plus le voir, mais les soldats me dirent
que, depuis plus d'une heure, il ne faisait que roder dans l'ecurie,
en marchant a quatre pattes et faisant des hurlements comme un ours.
Comme notre feu ne donnait plus assez de clarte, j'eus de la peine a
le decouvrir: a la fin, je le trouvai et, pour le voir de plus pres,
j'allumai un morceau de bois resineux. Lorsque je l'approchai, il se
mit a rire, jeta des cris absolument comme un ours, en nous
poursuivant les uns apres les autres, et toujours en marchant sur les
mains et les pieds. Quelquefois il parlait, mais en italien; je
compris qu'il pensait etre dans son pays, au milieu des montagnes,
jouant avec ses amis d'enfance; par moments, aussi, il appelait son
pere et sa mere; enfin le pauvre Faloppa etait devenu fou.
Comme il fallait provisoirement l'abandonner pour aller voir le
nouveau logement, je pris mes precautions pour que, pendant mon
absence, il ne lui arrivat rien de facheux: nous eteignimes le feu et
fermames la porte. Arrives au nouveau logement, nous trouvames les
soldats du train occupes a manger la soupe. Ils n'avaient pas l'air
d'avoir eu de la misere; cela se concoit, car, depuis le mois de
septembre, ils etaient a Kowno.
Avant de me jeter sur la paille, je demandai au paysan s'il voulait
venir avec moi prendre un soldat malade pour le conduire ou nous
etions; que je lui donnerais cinq francs, et, en meme temps, je lui
fis voir la piece. Le paysan n'avait pas encore repondu, que les
soldats allemands nous proposerent de leur donner la preference: "Et
nous, dit un soldat du train, nous irons pour rien.--Et nous lui
donnerons encore la soupe!" dit le second. Je leur temoignai ma
reconnaissance en leur disant que l'on voyait bien qu'ils etaient
Francais. Ils prirent une chaise de bois pour transporter le malade,
et nous partimes, mais, comme je marchais avec peine, ils me donnerent
le bras. Je leur contai la triste position de Faloppa, qu'il faudrait
abandonner a la merci des Russes: "Comment, des Russes? dit un s
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