allons sortir. Moi, je vais rentrer a l'hotel
par la grande porte; vous, vous allez prendre la rue de Valois, a cette
heure deserte. En longeant le mur de mon jardin, vous apercevrez une
petite porte: elle sera ouverte. Vous la pousserez, et vous serez chez
moi, ou nous pourrons deliberer en paix.
Les choses s'accomplirent ainsi, et le resultat de cette deliberation,
tenue tranquillement dans l'appartement du colonel, fut qu'Antoine
partirait le soir pour Bale; seulement, au lieu de prendre le train a
Paris, ou une surveillance pouvait etre organisee, il le prendrait a
Nogent. Le colonel l'accompagnerait jusqu'a Bale.
Laissant son oncle dans son appartement, ou Horace seul le servit,
le colonel, pour ecarter tous les soupcons, sortit comme il en avait
l'habitude.
A onze heures du soir, ils monterent ensemble en voiture, rue de Valois,
et se firent conduire a l'entree de Nogent, ou ils renvoyerent leur
voiture. Ils traverserent a pied le village et arriverent a la gare en
temps pour prendre le train d'une heure. Mais le colonel ne demanda
pas des billets directs pour Mulhouse ou pour Bale; il les prit pour
Longueville; a Longueville, il en prit d'autres pour Troyes; a Troyes,
d'autres pour Vesoul; a Vesoul, d'autres pour Mulhouse; a Mulhouse
enfin, d'autres pour Bale.
Si on les suivait, il serait bien difficile de se reconnaitre dans cette
confusion.
Ils passerent la frontiere sans difficulte. A Saint-Louis, Antoine crut,
il est vrai, qu'on l'examinait avec attention, mais ce fut une fausse
alerte.
A Bale, le colonel embrassa son oncle et le quitta, ayant hate de
revenir a Paris pour rassurer Therese.
Il eut voulu faire pour elle ce qu'il avait fait pour Antoine, et
l'accompagner jusqu'a Bale pour la remettre aux mains propres de son
pere qui l'attendait; mais il n'osa pas se proposer pour ce voyage, par
respect pour Michel, et ce fut Sorieul qui dut la conduire.
Il se trouva seulement a la gare de l'Est, pour lui faire ses adieux
avant qu'elle montat en wagon.
Michel etait la aussi.
Ces adieux furent tristes: elle partait pour l'exil. Quand se
reverraient-ils? Quelle existence allait-elle mener? Antoine, il est
vrai, lui avait dit et repete qu'il ne resterait pas longtemps en
Allemagne, et qu'il rentrerait quand l'Empire serait renverse, ce qui
devait arriver tres prochainement. Mais c'etaient la les paroles d'un
fanatique qui croyait naivement ce qu'il esperait.
Comme il temoignait ses craint
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